Les lourds investissements consentis par Télé Sénégal avaient permis d’obtenir plus facilement un correspondant à l’étranger qu’au Sénégal. Dès lors, il était devenu plus qu’évident que la dyarchie dans le management du système des télécoms du Sénégal avec d’un côté Télé Sénégal et de l’autre la Direction des Télécoms nationales ne ferait qu’approfondir les disparités. Les énormes difficultés et l’échec du Plan de stabilisation ont amené l’Etat à mettre en œuvre un plan de redressement économique et financier 80-85. C’est justement dans ce contexte qu’Abdou Diouf arrive au pouvoir le 1er janvier 81.
Alors premier Ministre, ses relations privilégiées avec Alassane Dialy Ndiaye vont faciliter les contacts avec les cadres et ingénieurs des télécoms de l’Opts , de l’Office de radiodiffusion télévision du Sénégal et ceux de télé Sénégal .C’est ainsi que dès le mois d’avril 81 , il est mis sur pied un comité consultatif technique des télécoms avec l’accord du Ministre de l’Information et des télécoms ; ce comité regroupait outre Alassane Dialy Ndiaye des ingénieurs comme Samoura, Souleymane Mbaye, Alioune Mbodj Dione , Mamadou Cissé , et beaucoup d’autres cadres avec pour mission de réfléchir sur une stratégie qui permettrait de redimensionner les réseaux , mais surtout de proposer des solutions aptes à combler le gap entre l’international et le local afin de ne pas compromettre les avancées de Télé Sénégal. Les conclusions du travail du comité ont fait l’objet d’un rapport qu’Alassane Dialy a eu le privilège de remettre à son excellence le Président Diouf.
Parmi les mesures phares qu’il va initier, figurait en bonne place la convocation des Journées Sénégalaises des Télécommunications qui sans aucun doute est le premier consensus fondateur de l’évolution des télécommunications sénégalaises.
Ainsi sous la houlette de Monsieur feu Djibo Leyti Kâ, Ministre en charge de la Communication, en présence de Monsieur Jean Jip Guep vice-secrétaire général de l’UIT, cette belle initiative allait rassembler du 15 au 18 Juin 1983, tous les cadres des Télécoms issus de l’OPT, de Télé Sénégal et de l’Office de Radiodiffusion Télévision du Sénégal (ORTS dont le développement était tributaire de celui des Télécommunications qui en étaient le support technique. Les cadres du ministère aussi prirent part aux travaux. Comme l’avait exigé le Ministre lors de son allocution d’ouverture, et sous la Présidence de Monsieur Alassane Dialy Ndiaye, au terme de quatre Journées de Réflexions intenses et sans tabous, dans les locaux du CICES, « un diagnostic sans complaisance » fut établi.
Il en sortira une trentaine de mesures, dont certaines « urgentes et ponctuelles » et d’autres « urgentes et permanentes ». Les quatre premières mesures urgentes et ponctuelles étaient ainsi déclinées :
1 : « Accorder une priorité au développement des Télécommunications. »
2 : « Mettre en place un organe unique de décision pour assurer avec vigueur et cohérence, la coordination des actions de développement du secteur des Télécommunications.
3 : « Étudier la restructuration du secteur des Télécommunications en tenant dûment compte des aspects techniques, administratifs, juridiques, financiers, sociaux et humains. »
4 : « Élaborer, renforcer et harmoniser les Plans Directeurs des différentes entités de Télécommunications sur la base d’une Stratégie Commune… ».
La sentence était sans équivoque et la direction clairement tracée : il faut fusionner les deux entités en charge du secteur des Télécommunications. La première mesure s’inscrivait dans la logique macroéconomique du gouvernement et cadrait parfaitement avec les recommandations du Plan de Lagos. La mise en œuvre de la deuxième rendait optimale l’opérationnalisation de la quatrième. Malgré la pertinence des Conclusions, l’application des Recommandations tardait à se concrétiser et la situation continuait de se dégrader.
C’est dans ce contexte et tout le long de la période que, les batailles de positionnement pour ou contre la réforme- se sont déroulées de manière farouche, en coulisse et en haut lieu et dans tout l’écosystème des Télécoms. C’est le Président de la République Abdou Diouf qui allait « siffler la fin de la récréation ». En effet en janvier 1985, de retour de Washington où se déroulait, quelques jours plutôt l’inauguration du nouveau siège d’Intelsat, le Président de la République prit la décision historique de créer au cours de cette année une entité unique regroupant toutes les activités des Télécom.
Une telle décision, annoncée dans ces conditions allait forcément susciter des inquiétudes et des interrogations surtout chez les travailleurs et leurs organisations ; ce qui est tout à fait compréhensible, d’autant que nous étions en plein dans la mise en œuvre du Plan de Redressement Économique et Financier. Or, ce plan comportait entre autres mesures, la restructuration du secteur parapublic avec à la clef la signature de Contrats- Plan entre le gouvernement et les Entreprises publiques. Cette situation a eu des impacts sur les effectifs avec des exigences de départs volontaires et des ajustements.
Malgré les résistances et les oppositions, le gouvernement sous l’impulsion du ministre Djibo Ka après leur adoption par le conseil des ministres du 25 juin soumet les projets de de loi 85-35 et 85-36 à l’Assemblée nationale qui l’approuvera sans grandes difficultés. Ainsi naquirent respectivement l’OPCE et la Société Nationale des Télécommunications (SONATEL). Télé Sénégal crée en 1981 en tant que société nationale de droit privé absorbait ainsi la Direction des Télécommunications de l’OPTS pour donner naissance à cette nouvelle entreprise. Mais si la date du 23 juillet consacre l’acte de naissance de la Société Nationale des Télécommunications, le 1er octobre doit être considéré à juste titre comme le jour de son baptême. En effet dès le mois de septembre Abdou Diouf avait nommé Alassane Dialy Ndiaye premier Directeur Général de la Sonatel. Ce n’est que justice compte tenu de son rôle dans les concertons qu’il a conduites de main de maître et de sa brillante réussite à transformer Télé Sénégal.
C’est ainsi qu’il mit en place le management avec les différentes organisations avant de lancer les activités le 1er octobre 85.
Grand merci aux pionniers !!!!
Prochaine contribution. : les résistances aux changements et les plans de rattrapage technique et technologique.
Mamadou Aidara Diop
(Source : Le Dakarois, 1er octobre 2025)