17 juin 2015. Nous y sommes
enfin. Cette date, tant attendue
par les populations, marque la fin
du délai fixé pour le passage de
l’analogie au numérique. La plupart
des Etats, dont le Sénégal,
s’étaient engagés, dans un accord
dit GE06 (Genève 2006), à procéder
à la transition numérique. A
cet effet, une pile d’interrogations
taraude l’esprit de bon nombre
d’inconditionnels du petit écran.
Que vont devenir nos vieux
postes téléviseurs ? Comment va
s’opérer la transition ?
La grande préoccupation était
surtout de se demander si le Sénégalais
« gorgorlou » (débrouillard),
déjà acculé par la DQ
(dépense quotidienne), va encore
sortir de l’argent pour se payer
d’un poste téléviseur. Mais si l’on
en croit les autorités du Comité
national de pilotage de l’analogie
vers le numérique (Contan), le
consommateur devra juste payer
d’un décodeur pour 10000 FCfa
pour disposer d’une télévision numérique.
Cette grande révolution technologique
dans le secteur de l’audiovisuel
laisse apparaître beaucoup
d’espoirs en termes d’impacts. La
télévision numérique terrestre
(Tnt), selon le modèle économique
adopté par le Sénégal,
offre des avantages à la fois pour
les éditeurs de télévision, les auteurs,
les créateurs et producteurs
de contenus, les développeurs
d’application informatiques, les
fournisseurs de services interactifs
et l’Etat. Grâce au basculement
du numérique, les
consommateurs auront désormais
la possibilité d’accéder à un
bouquet de chaînes nationales
gratuites (jusqu’à 40 chaînes et de
manière évolutive), à caractère
généraliste, thématique, à dimension
nationale et locale, mais aussi
à des services comme la vidéo de
rattrapage ou replay, aux données
associées aux contenues, à la
radio via le téléviseur.
Vu le contexte actuel du paysage
audiovisuel sénégalais, il y a
de quoi s’inquiéter sur la réussite
du basculement au numérique
dans notre pays. Le réveil risque
d’être brutal pour nos télévisions
eu égard du contenu servi quotidiennement
aux populations, devenues
de plus en plus exigeantes
et critiques. Des télévisions, pour
combler le vide de leur grille de
programmes, se contentent des
télénovelas importées ou de ces
émissions dépourvues de sens.
Pire, le système Lutte-musiquedanse
(Lmd) a fini d’occuper une
place de choix sur nos petits
écrans au détriment des émissions
instructives qui devaient
participer à éveiller les
consciences.
Avec cette transition, nos télévisions
sont obligées de mettre
en place des contenus qui
s’adaptent aux normes de la Tnt
sous peine de rater le train de
la révolution du numérique. Le
mode analogique, après plusieurs
décennies de règne dans
le milieu audiovisuel, cède la
place au numérique avec toute
une palette d’espoirs et d’attentes.
Abdou Diaw et Ibrahima Ba
(Source : Le Soleil, 17 juin 2015)
Le défi des contenus
Grace à ses enjeux économiques,
juridiques, sécuritaires, environnementaux,
politiques, le passage à la télévision
numérique pose l’urgence
nécessité pour les télévisions sénégalaises
de revoir leurs contenus, en faisant
preuve d’une capacité de création
et d’innovation. La Tnt va ouvrir à tous
les Sénégalais un monde nouveau où
la convergence entre l’audiovisuel et
l’internet offre aux citoyens de nouvelles
opportunités. Une telle situation
doit pousser les acteurs à faire de la télévision
un véritable outil de développement
économique et social à travers
la pertinence des programmes qui seront
diffusés. Un accent particulier doit
être mis sur les contenus éducationnels,
scientifiques pour le bien du peuple
sénégalais. « La Tnt est une
occasion de développer des contenus
visant à promouvoir la diversité culturelle
à travers un paysage audiovisuel
reflétant notre projet de société », explique
Ousseynou Dieng, expert au
Contan.
De ce fait, l’Etat doit accompagner
la production des contenus dans l’objectif
d’arriver à une télévision éducative,
culturelle, à mesure d’être un
véritable outil de développement via
l’éclosion d’un paysage audiovisuel
riche, diversifié et équilibré. Ce sera
également une occasion de favoriser
la création de chaînes thématiques et
régionales dans le but de promouvoir
davantage la diversité culturelle et linguistique,
de contribuer au développement
social et économique à travers
l’accès à l’éducation, à la santé… Par
ailleurs, selon le rapport annuel de
2014 du Conseil national de régulation
de l’audiovisuel (Cnra), compte tenu
de l’arrivée de nouvelles chaînes sénégalaises
qui vont enrichir le paysage
audiovisuel national et au regard de la
forte concurrence des chaînes étrangères,
à travers le satellite et l’Internet,
il est nécessaire de mettre en place un
mécanisme pour l’appui à la production
nationale.