Vote par Internet : Les Sénégalais de l’extérieur devront encore attendre
jeudi 10 juin 2004
« Maintenant, les avions sont pilotés par système électronique. Les banques aussi sont informatisées ». Ce que constatant, Me Abdoulaye Babou posait, en décembre dernier, une question orale au gouvernement. Il voulait que les Sénégalais vivant à l’extérieur puissent s’acquitter de leur droit de vote via Internet. Car Me Babou reste convaincu que ceux-ci n’exerçaient pas « en masse » cet acte civique, qui est aussi un devoir. Les raisons de leur abstention, explique-t-il, restent liées à la distance, au nombre insuffisant de lieux de vote à l’étranger et au déficit du matériel électoral. Ainsi, pensait-il, « Internet reste la voie royale pour résoudre ce problème pas du tout difficile ».
Même si ses collègues des autres groupes parlementaires ont loué et salué la « pertinence » de sa proposition, tous, autant que le ministre de l’Intérieur, ont trouvé que la requête est encore « prématurée ». De l’avis de Cheikh Sadibou Fall, de Khalifa Ababacar Sall du Parti socialiste et de Doudou Wade du groupe « Libéral et démocratique », pour ne citer que ceux-là, il faut avancer lentement, mais sûrement. L’heure, ont-ils laissé entendre, est à la sécurisation du fichier électoral. Adopter une loi autorisant les émigrés sénégalais à voter par Internet pose d’abord un problème de moyens à la fois humains et matériels. S’y ajoute qu’Internet offre aussi des avantages autant que des inconvénients. Parmi ceux-ci, les réfractaires à la proposition de Me Babou ont invoqué des risques liés à la sécurité du scrutin. Ils craignent qu’une telle procédure ne viole le principe qui veut que le vote soit « personnel et secret ». L’essentiel des intervenants craignent aussi que si une telle loi était adoptée, qu’elle ne soit récupérée par le « grand banditisme ». « Même l’Europe n’a pas encore pris ce risque ».
Le ministre de l’Intérieur a renchéri également que les Sénégalais qui vivent à l’étranger, « sont pour la plupart des analphabètes ». D’où, a-t-il déduit, « il faut commencer par les intéresser et les initier à l’informatique ». Cependant, même si la proposition de Me Babou n’est pas retenue « dans le court terme au moins », le ministre de l’Intérieur a souhaité qu’une commission de réflexion à ce sujet soit mise sur pied. Il a d’ailleurs révélé que, pour sa part, le gouvernement sénégalais est en train de cogiter sur la possibilité d’un « vote électronique » qui ne signifie pas, a-t-il précisé, « un vote par internet ». Nguirane Ndiaye, qui présidait la rencontre, a donné rendez-vous aux élus du peuple le mercredi prochain pour qu’ils se prononcent sur des questions orales du député Daouda Faye, dont une porte sur l’importation des véhicules d’occasion. Espérons que les députés seront plus nombreux à cette séance ; car hier, ils ne faisaient pas lésion. Et pourtant !
Alioune Badara DIALLO
(Source : Wal Fadjri 10 juin 2004)