Téléphonie mobile : SpaceX investit 17 milliards $ dans de nouvelles fréquences pour Starlink
mardi 9 septembre 2025
Cette annonce illustre la course mondiale à la connectivité spatiale. Elle pourrait, à terme, influer sur les stratégies numériques en Afrique où Starlink est déjà présent, mais confronté à des défis d’accessibilité et de régulation.
SpaceX, la société d’Elon Musk qui détient le réseau satellitaire Starlink, a annoncé lundi 8 septembre le rachat pour 17 milliards $ de fréquences mobiles détenues par EchoStar aux États-Unis. L’opération vise, apprend-on, à accélérer le développement de la technologie dite « direct-to-cell », qui permet à un téléphone mobile de se connecter directement à un satellite sans passer par une antenne terrestre.
Selon les détails rapportés par plusieurs médias internationaux, le rachat annoncé concerne les licences de spectre AWS-4 et H-block, utilisées pour les communications mobiles et satellitaires. SpaceX paiera jusqu’à 8,5 milliards $ en numéraire et un montant équivalent en actions, tout en prenant en charge 2 milliards $ d’intérêts liés à la dette d’EchoStar jusqu’en 2027.
Pour EchoStar, qui croule sous une dette de 25 milliards $ et faisait l’objet d’une enquête de la Federal Communications Commission (FCC) pour non-utilisation de certaines fréquences, cette cession est un ballon d’oxygène. Quant à SpaceX, elle lui permet de combiner le spectre d’EchoStar avec ses satellites Starlink afin de faire progresser son projet de connectivité mobile par satellite, présenté comme un moyen de réduire les zones blanches.
L’accord ne se limite pas au transfert de fréquences. SpaceX et EchoStar ont également annoncé un partenariat commercial de long terme qui permettra aux abonnés de Boost Mobile, la marque prépayée d’EchoStar, d’accéder au futur service Starlink direct-to-cell via le réseau 5G de l’opérateur.
« Dans cette nouvelle étape […] SpaceX développera une nouvelle génération de satellites Starlink direct-to-cell, avec des performances accrues qui permettront d’améliorer la couverture pour les clients partout dans le monde. », a commenté Gwynne Shotwell, présidente et directrice de l’exploitation de SpaceX, précisant que les premiers satellites Starlink équipés de capacités direct-to-cell ont déjà permis « de connecter des millions de personnes dans des moments critiques — lors de catastrophes naturelles, pour joindre les secours ou leurs proches, ou lorsqu’elles se trouvaient hors réseau »
Le direct-to-cell, entre potentiel et défis
Si l’opération concerne d’abord les États-Unis, elle s’inscrit dans une dynamique mondiale qui touche aussi l’Afrique. Depuis 2023, Starlink y est présent dans plus de vingt pays, mais l’accès reste limité par le prix du matériel et des abonnements, qui dépassent souvent le revenu moyen des ménages. Le direct-to-cell pourrait changer cet équilibre en supprimant l’achat d’un kit de connexion, puisque n’importe quel téléphone mobile pourrait théoriquement se connecter directement aux satellites.
Des inconnues demeurent toutefois. On ne sait pas encore quel sera le coût d’un tel service pour l’utilisateur final ni comment il s’articulera avec les opérateurs de téléphonie mobile déjà en place. Les questions réglementaires restent également centrales, chaque pays devant autoriser l’usage des fréquences satellites pour des services mobiles.
Il sera également intéressant de voir l’impact d’une potentielle concrétisation de la technologie direct-to-cell sur le marché africain de l’Internet par satellite. Outre Starlink, d’autres acteurs avancent leurs pions, à l’image d’Eutelsat-OneWeb qui mise sur des solutions multi-orbites, ou encore de Lynk Global, AST SpaceMobile, Omnispace et Yahsat. Certains opérateurs nationaux, comme Nigcomsat au Nigeria, cherchent aussi à se positionner.
Selon la GSMA, l’Afrique subsaharienne comptait environ 320 millions d’abonnés à l’Internet mobile fin 2023, soit un taux de pénétration de 27 %. Pourtant, près de 710 millions de personnes, soit 60 % de la population, n’utilisaient toujours pas Internet mobile alors même qu’elles vivent dans des zones couvertes par un réseau. Parallèlement, la Banque mondiale estime qu’une augmentation de 10 % de la pénétration de l’Internet mobile en Afrique peut entraîner une augmentation du PIB par habitant de 2,5%.
Louis-Nino Kansoun
(Source : Agence Ecofin, 9 septembre 2025)