Sénégal : les députés vont adopter une loi sur la santé digitale
mardi 22 avril 2025
L’ initiative parlementaire au Sénégal, qui s’inspire d’une loi type élaborée par la coalition internationale « Transform Health », vise à encadrer la transformation numérique du secteur sanitaire et devrait permettre de réglementer des aspects cruciaux comme la télémédecine et la gouvernance des données de santé.
L’Assemblée nationale du Sénégal accueille à partir de ce mardi un atelier de renforcement des capacités des parlementaires sur la digitalisation de la santé. Cette initiative de trois jours, qui se déroule du 22 au 24 avril, vise à préparer le terrain pour l’adoption d’une loi-cadre sur la santé numérique dans le pays.
La rencontre réunit principalement les membres de la Commission de la Santé, de la Population, des Affaires sociales et de la Solidarité nationale, ainsi que des représentants des commissions des Lois et des Finances. Elle bénéficie du soutien technique et financier d’ENDA Santé et de l’Agence sénégalaise de la Couverture sanitaire universelle (Sen-CSU), et s’inscrit dans une dynamique globale de modernisation du système sanitaire sénégalais.
« Aucun système de santé ne peut être performant aujourd’hui sans les technologies issues de la révolution numérique, dont les opportunités incommensurables ne sont plus à démontrer », a affirmé, dans son allocution d’ouverture, Mme Khady Sarr, Présidente de la Commission de la Santé.
Mme Sarr a insisté sur le fait que cette transformation numérique constitue un levier essentiel pour améliorer l’accessibilité et la qualité des soins à travers tout le territoire national. Elle permettra notamment d’étendre l’offre de services sanitaires dans les zones les plus reculées du pays, réduisant ainsi les inégalités territoriales en matière d’accès aux soins.
Par ailleurs, Mme Sarr a mis en avant le rôle déterminant que jouera la digitalisation dans l’optimisation de la collecte et de l’analyse des données sanitaires. Ce processus facilitera considérablement la prise de décisions basées sur des informations fiables et actualisées, contribuant ainsi à une meilleure planification et à une allocation plus efficiente des ressources dans le secteur de la santé.
Le Sénégal s’inscrit dans une initiative mondiale
Cette rencontre s’inscrit dans le cadre plus large de la coalition « Transform Health Sénégal », une initiative nationale faisant partie d’un mouvement mondial en faveur de la digitalisation des systèmes de santé.
Dr Papa Djibril Ndoye, directeur adjoint d’ENDA Santé, a précisé lors de son intervention que cette coalition regroupe une trentaine d’organisations de la société civile sénégalaise. Toutes ces structures sont unies par une vision commune : moderniser le secteur de la santé à travers l’intégration de solutions numériques innovantes adaptées aux réalités locales.
ENDA Santé, en tant que chef de file de cette coalition au Sénégal, concentre particulièrement son action sur la gouvernance des données sanitaires. Cet aspect revêt une importance capitale dans un contexte où la collecte, le stockage et l’utilisation des informations médicales personnelles nécessitent un encadrement rigoureux pour garantir à la fois leur sécurité et le respect de la vie privée des patients.
À l’échelle internationale, l’initiative « Transform Health » travaille activement à l’élaboration d’une loi type sur la digitalisation des systèmes de santé, document qui pourrait servir de référence pour harmoniser les législations nationales et faciliter une approche cohérente et éthique de la santé numérique à travers le monde.
Dr Ndoye a également souligné l’ambition de porter cette loi type au niveau de l’Assemblée mondiale de la santé, afin d’en faire un instrument de référence susceptible d’inspirer les gouvernements dans leur démarche de transformation numérique du secteur sanitaire.
Cette approche globale vise à favoriser une transition harmonieuse vers des systèmes de santé digitalisés, tout en veillant à ce que cette évolution technologique profite véritablement aux populations, notamment les plus vulnérables.
Les enjeux majeurs de la santé digitale pour le Sénégal
La santé digitale représente une véritable révolution dans l’organisation et la délivrance des soins. Au Sénégal, cette transformation s’appuie sur le Plan Stratégique Santé Digitale (PSSD), instrument conçu pour faciliter l’atteinte de la couverture sanitaire universelle.
Ce plan ambitieux vise à intégrer les technologies numériques dans tous les aspects du système de santé, de la prévention à la prise en charge des patients, en passant par la formation continue des professionnels de santé.
La télémédecine constitue l’une des applications les plus prometteuses de cette digitalisation. Elle permet de rapprocher virtuellement les patients des spécialistes, réduisant ainsi les contraintes liées à la distance géographique et au manque de personnel qualifié dans certaines régions. Cette approche s’avère particulièrement pertinente pour le Sénégal, où la répartition des ressources humaines en santé reste inégale entre zones urbaines et rurales.
La gestion électronique des données médicales représente un autre aspect fondamental de cette transformation. L’informatisation des dossiers patients facilite le suivi médical, réduit les risques d’erreurs et permet une meilleure coordination entre les différents intervenants du parcours de soins.
Toutefois, cet avantage s’accompagne de défis importants en matière de confidentialité et de sécurité des données personnelles, nécessitant un cadre juridique solide.
L’un des enjeux majeurs concerne également la réduction des coûts de santé grâce aux technologies numériques. La digitalisation offre la possibilité de rationaliser les processus, d’éviter les examens redondants et d’optimiser l’utilisation des ressources disponibles.
Elle ouvre également la voie à des modèles de financement innovants, susceptibles de rendre le système de santé plus performant et plus accessible pour l’ensemble de la population.
Le rôle déterminant des parlementaires dans l’encadrement législatif
Face à ces multiples enjeux, les parlementaires sénégalais sont appelés à jouer un rôle de premier plan dans la mise en place d’un cadre réglementaire adapté. « En tant que législateurs, nous avons un rôle essentiel à jouer dans l’encadrement des lois qui régiront ces transformations », a souligné Mme Sarr,
Cette responsabilité implique une compréhension approfondie des aspects techniques, éthiques et sociaux de la santé numérique.
L’atelier organisé à l’Assemblée nationale vise précisément à renforcer les capacités des élus dans ce domaine. Il leur permettra de s’imprégner des réalités de l’écosystème numérique sanitaire, de ses potentialités mais aussi de ses limites et risques potentiels.
Cette formation approfondie les préparera à examiner avec discernement les projets de loi gouvernementaux ou à proposer eux-mêmes des initiatives législatives pertinentes et équilibrées.
La présidente de la Commission Santé a insisté sur la nécessité d’un cadre structurant et efficace pour accompagner cette digitalisation. Il s’agit notamment de garantir que les avancées technologiques servent véritablement l’intérêt des patients et contribuent à l’amélioration globale du système de santé, sans créer de nouvelles formes d’exclusion ou de vulnérabilités.
Les questions relatives à la protection des données personnelles, à l’interopérabilité des systèmes, à l’équité d’accès aux services numériques de santé et à la formation des professionnels figurent parmi les priorités à aborder dans ce cadre législatif.
La session, qui se poursuit jusqu’au 24 avril, devrait déboucher sur des orientations concrètes pour l’élaboration d’un texte de loi adapté aux défis spécifiques du Sénégal en matière de santé numérique.
Cette démarche s’inscrit dans une vision à long terme qui vise à positionner le pays comme un acteur innovant dans le domaine de la santé digitale en Afrique, tout en s’alignant sur les standards internationaux émergents dans ce secteur en pleine expansion.
(Source : APAnews, 22 avril 2025)