RDC : les taxes sur les services mobiles freinent l’inclusion numérique
mercredi 25 juin 2025
Dans un paysage numérique en mutation, les choix politiques et économiques façonnent en profondeur l’accès aux services numériques. Le niveau et la nature des taxes déterminent combien les utilisateurs paient pour appeler, se connecter à Internet ou effectuer des transactions mobiles.
La République démocratique du Congo (RDC) impose à ses services mobiles une fiscalité sectorielle lourde, répercutée sur le prix des services de voix, de data et de mobile money. Selon le rapport « Mobile Sector Taxation : Comparative Fiscal Burden in DRC » de l’Association mondiale des opérateurs de téléphonie (GSMA) publié en juin 2025, cette pression fiscale limite l’accès aux services numériques, freine l’inclusion financière et nuit à la transformation digitale du pays.
Le document recense plusieurs prélèvements spécifiques. Les revenus issus de la vente de services mobiles sont soumis à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à 16 %, à laquelle s’ajoute un droit d’accise de 10 %. Sont également imposées une contribution de 2 % au fonds de service universel, prélevée sur le chiffre d’affaires, ainsi qu’une redevance RAM de 3,6 %, destinée à financer la connectivité Internet dans les établissements universitaires. Bien que la taxe dédiée au mobile money ait été levée, ces opérations restent soumises à la TVA et au droit d’accise, ce qui en augmente le coût.
Répercussions sur l’accès aux services
L’addition de ces taxes alourdit le prix final pour les utilisateurs, en particulier ceux dont les revenus sont les plus bas. Cette situation affecte notamment les populations rurales, les jeunes et les femmes, pour qui les services mobiles représentent un levier essentiel d’accès à l’information, à l’éducation et aux services financiers. La GSMA souligne que cette pression fiscale limite la diffusion des outils numériques auprès des groupes les plus exposés à l’exclusion.
Les données de l’Union internationale des télécommunications (UIT) confirment ce constat. En 2024, le coût moyen des services mobiles en RDC représentait 16,4 % du revenu national brut par habitant, alors que l’UIT fixe à 2 % le seuil d’abordabilité. Cet écart s’explique notamment par la structure fiscale du secteur, qui pèse sur les opérateurs et les consommateurs.
Recommandations et perspectives
Face à ce diagnostic, la GSMA recommande une révision de la politique fiscale appliquée aux services mobiles. Elle suggère de ramener le droit d’accise à 3 %, de réduire le nombre de prélèvements spécifiques et de simplifier les mécanismes de perception afin de renforcer l’investissement et d’améliorer la conformité des acteurs du secteur. L’organisation préconise aussi l’exonération des petites transactions de mobile money pour en favoriser l’usage auprès des ménages à faibles revenus.
En 2018, l’Association affirmait que « la réforme fiscale du secteur conduirait à un développement considérable de la pénétration et de l’utilisation des services mobiles, au sein notamment des catégories de population à faibles revenus. Cette croissance est également susceptible d’accroître le PIB et les recettes fiscales du gouvernement à moyen terme ». Dans son rapport « Promouvoir la transformation numérique des économies africaines », la GSMA estime qu’en réduisant ou supprimant diverses taxes que payent les acteurs, le prix de l’internet mobile pourrait baisser de 13 % d’une année sur l’autre, d’ici 2028.
Melchior Koba
(Source : Agence Ecofin, 25 juin 2025)