Il est des événements que l’on pourrait considérer comme anecdotiques… si seulement ils ne concernaient pas la colonne vertébrale de l’État.
Depuis plusieurs jours, la Direction Générale des Impôts et Domaines (DGID) est victime d’une panne (pardon, d’un « problème technique ») qui a paralysé ses services en ligne. Voilà donc la maison-mère de la collecte fiscale transformée en cyberfantôme, tandis que l’État se contente d’un communiqué lisse, sans un mot sur la nature réelle de la crise.
Ce silence officiel est un scandale.
Car, il ne s’agit pas d’un banal bug informatique. Il s’agit d’un risque majeur de souveraineté, d’une possible concussion numérique, d’une faille stratégiquement catastrophique.
En 2023, la France a vu ses hôpitaux paralysés par des attaques. Le Niger a vu les données de son Trésor public diffusées en ligne. La Côte d’Ivoire a vu ses registres fonciers piratés et mis en vente. Tous ont réagi avec fermeté, transparence, et surtout… institutionnalisation de la riposte.
Et nous, que faisons-nous ?
Nous pouvons nous attendre à ce que la prochaine attaque vise la Santé, la Justice, la Primature ou.... la Présidence ?
Il est temps d’arrêter la politique de l’autruche numérique. Le Sénégal doit sortir du réflexe consistant à cacher les crises au lieu de les traiter. Nous n’avons besoin ni de rassurance cosmétique, ni de formules anesthésiantes. Nous avons besoin de Trois mesures urgentes et incontournables :
– La création d’une Agence Nationale de Cybersécurité, dotée de moyens réels, placée sous autorité directe du Premier ministre, avec une mission claire : protéger les données stratégiques du pays comme on protège une frontière.
– La transparence totale sur l’incident de la DGID. Qui a attaqué ? Quelles données ont été touchées ? Quel est le degré de compromission ? Faut-il informer officiellement les contribuables dont les dossiers auraient pu être exposés ? Le peuple sénégalais a le droit de savoir.
– L’ouverture d’une enquête parlementaire ou judiciaire, indépendante, pour déterminer les failles, les responsabilités et les urgences budgétaires à débloquer. Car, si nos systèmes ont été piratés par manque de moyens, c’est une faute politique, pas une fatalité.
On peut se remettre d’une panne. On ne se remet pas d’une tartufferie d’État.
La DGID n’est pas un cybercafé de quartier, c’est le coffre-fort numérique de la République. Et lorsqu’un coffre-fort vacille, ce ne sont pas seulement les contribuables qui tremblent, c’est toute la Nation.
Pour le communiqué, comme disent les Burkinabés : « c’est bon, mais, ce n’est pas arrivé ». Puisque, la cybersécurité n’est plus un sujet de techniciens. C’est, désormais, une affaire de citoyens.
Babou Biram Faye, Journaliste-Communicant
(Source : Groupe de WhatsApp du RASA 3 octobre 2025)