Pour une meilleure régulation des Communications électroniques au Sénégal
mercredi 17 juin 2015
La révolution économique axée
sur le numérique pour favoriser
le développement et le progrès social
qui bouleverse le visage de
l’économie mondiale n’épargne pas
l’Afrique, le Sénégal notamment.
On assiste ainsi de plus en plus à
la manifestation de l’appétit de
multinationales et la défense
acharnée – et légitime !- des opé-
rateurs historiques de leur statut
obtenu au prix d’investissements
et de compromis avec les gouvernements
qui, à tort ou à raison, en
ont fait des vaches à lait financières.
Pour mieux profiter de
l’économie numérique et électronique
et en éviter les travers, il est
donc urgent pour l’Etat du Sénégal
d’opérer une refonte globale du
secteur des télécommunications
pour en améliorer le niveau de
concurrence tout en simplifiant un
certain nombre de ses règles de
fonctionnement.
Tel qu’il a été constaté sous d’autres
cieux (en Europe notamment sous
le sceau de la neutralité technologique)
de la convergence croissante
entre les technologies de l’informatique,
des télécommunications et
de l’audiovisuel, le temps est venu
de la cohérence de toute la régulation
économique et juridique de
tout l’environnement des nouvelles
technologies. Autrement dit, que
le cadre juridique ne soit plus limité
aux seules postes et télécommunications
(on remarquera d’ailleurs
la marginalité de la régulation
postale) mais étendu à celui de
toutes les communications électroniques.
Il faut remarquer, en effet, que
le secteur des télécommunications
au Sénégal a été marqué par une
ouverture à la concurrence lors des
dernières années dans un contexte
technologique extrêmement innovant
et en constante évolution.
Bien qu’ayant compris l’enjeu du
secteur par l’adoption du Code des
Télécommunications de 2011 et par
le renforcement récent des missions
de contrôle et de supervision
de l’Autorité de Régulation des Té-
lécommunications et Postes par le
Gouvernement du Sénégal, il faut
maintenant être en phase avec les
exigences du secteur des nouvelles
technologies en codifiant un Code
des Postes et des communications
électroniques. Ce changement de
dénomination aura pour but de traduire
le changement de portée de
la réglementation et appliquer les
anciennes dispositions du code relatives
aux télécommunications à
toutes les activités de diffusion
d’information en mode électronique.
Par « communications électroniques
» s’entendront ainsi
toutes émissions, transmissions ou
réceptions de signes, de signaux,
d’écrits, d’images ou de sons, par
voie électromagnétique. Il faut
toutefois préciser que l’unification
juridique n’aura pas pour but
d’uniformiser le cadre juridique.
C’est-à-dire que même si la nouvelle
harmonise l’ensemble des ré-
seaux de communication, qu’ils relèvent
des secteurs de l’audiovisuel ou celui des télécommunications,
les contenus fournis sur ces ré-
seaux devront subsister dans des
régimes juridiques spéciaux.
Ainsi un organe comme la
Conseil National de Régulation de
l’Audiovisuel aura pour mission
d’assurer la réglementation des
contenus audiovisuels, ainsi que
celle du déploiement des services
numériques (et analogiques si elles
subsistent) de diffusion de la radio
ou de la télévision. A côté de la
CNRA, une agence comme l’ARTP
pourra ainsi jouer pleinement son
rôle de régulation lequel pourrait
être étendu à la réglementation des
dévolutions de fréquences et peut
être aussi faire office également
d’un Conseil de la Concurrence.
Par ailleurs, le législateur devra
aussi être au diapason des réalités
technologiques en prévoyant les
domaines dans lesquels l’informatique
est le moyen de la fraude
(délit de droit commun ou texte
spécial comme la loi sur les données
personnelles) et celles où elle
est l’objet du même délit (qualification
spécifique des atteintes aux
systèmes de traitement automatisé
de données). Il est par conséquent
plus qu’urgent de mettre en place
un cadre juridique unifié qui consacre
la régulation économique du
secteur afin de permettre l’émergence
et le développement des nouvelles
technologies et de leurs acteurs
avec le souci permanent du
service public.
Maître Yamar Samb, Avocat, Barreau de Paris
E-mail : yamarsamb@yahoo.fr
(Source : Le Soleil, 17 juin 2015)