L’Etat du Sénégal est confronté à un surendettement doublé d’une raréfication des sources de recettes, ce qui le met dans une situation de tension de trésorerie extrême. Ceci est un secret de polichinelle.
Avec le FMI qui a fermé les robinets depuis un an et en l’absence d’appui budgétaire des bailleurs bilatéraux (France et autres pays de l’Union Européenne), la seule alternative demeure la mobilisation des ressources nationales et communautaires.
Pour les entreprises locales, cette situation se manifeste par une forte pression fiscale et un recouvrement tous azimuts pour permettre à l’Etat de couvrir ses charges.
L’élargissement de l’assiette fiscale a toujours été prôné par les services fiscaux mais au niveau opérationnel, c’est la solution de facilité qui est toujours de mise, c’est-à-dire taper sur les entreprises formelles les plus visibles.
La taxation indirecte du numérique a été mise en place chez certains fournisseurs de services numériques depuis quelques temps mais c’est surtout les petites start-up et les consommateurs qui en souffrent suite à un ajustement des prix avec la TVA appliquée. Les multinationales detentrices des plateformes numériques continuent de récolter leur manne financière.
Si les recettes tirées par les GAFA sont encore marginales dans nos pays, le cas des VTC à enseignes internationales comme Yango, Heetch ou Yassir mérite toute notre attention. Ces sociétés souvent basées à l’étranger font travailler beaucoup de sénégalais et engrangent des milliards de recettes sans payer ni TVA, ni IS, ni CEL. Tandis qu’il suffit qu’un Sénégalais met en place le même modèle économique de VTC pour se voir inquiéter par les services fiscaux et voir son activité plombée. Il s’agit d’une concurrence déloyale encouragée par le fisc sénégalais.
Au finish, des milliards échappent au fisc pour atterrir à Dubaï ou dans des paradis fiscaux tandis que les entreprises sénégalaises qui sont dans le même secteur d’activité sont susceptibles de taxation.
Il faut que les services fiscaux sortent de leur zone de confort pour élargir la base de taxation des contribuables surtout sur les nouveaux métiers pourvoyeurs de forte valeur ajoutée.
Pour cela, il faut mettre à profit les entreprises nationales de services télecoms (Orange, Wave, Yas etc.) et réformer la loi sur les Donnés personnelles pour une meilleure traçabilité des flux financiers.
Au niveau de l’Union Européenne, de nombreux pays ont mis en place leur propre réglementation sur les taxes GAFA en attendant un consensus au sein de l’OCDE. Le Sénégal pourrait s’inspirer de ce modèle pour taxer le Chiffre d’Affaires réalisé au niveau national en passant par les fournisseurs de paiement électronique.
La souveraineté économique commence par mettre les entreprises locales dans les mêmes conditions d’exercice, ou mieux dans des conditions plus favorables que les multinationales afin de les rendre compétitives.
Le patriotisme économique doit être accompagné d’une justice fiscale équitable. À défaut on sera dans un éternel jeu de cache cache entre administration fiscale et entreprises locales surtaxées.
Cheikh Ahmed Tidiane Sy
(Source : LinkedIn, 5 juillet 2025)