Le Kenya adopte une stratégie pour faire de l’IA un moteur de croissance d’ici 2030
vendredi 2 mai 2025
C’est en mai 2024 que le Kenya a lancé l’élaboration de sa stratégie nationale d’IA. Fruit de consultations multisectorielles et d’un appui international, ce document figure désormais parmi les stratégies nationales d’IA élaborées en Afrique, aux côtés de celles du Nigeria, du Rwanda et de l’Algérie.
Le Kenya a publié sa première stratégie nationale d’intelligence artificielle pour la période 2025-2030. Le document trace les contours d’une vision claire pour une adoption de l’IA éthique, inclusive et tournée vers l’innovation. Il s’inscrit dans le programme plus large de transformation numérique du pays et adresse des signaux forts aux entreprises technologiques internationales, attentives à l’évolution des cadres réglementaires sur les marchés émergents.
Cette stratégie, bien que conçue à l’échelle nationale, reflète une dynamique plus large : l’adaptation des normes internationales de gouvernance de l’IA aux contextes émergents. Elle articule les ambitions de Nairobi autour de plusieurs axes, dont les infrastructures, la souveraineté des données, les cas d’usage sectoriels et l’innovation responsable. Elle esquisse également les grandes lignes d’une future législation.
La gouvernance des données est l’un des axes majeurs du texte. Le Kenya affiche son intention de bâtir un écosystème d’IA fondé sur des référentiels locaux, dans le respect de la confidentialité, de la cybersécurité et des principes éthiques. Ce choix pourrait impliquer de nouvelles contraintes pour les multinationales opérant via des infrastructures en nuage ou des flux transfrontaliers de données, notamment en matière de localisation ou de consentement.
Les secteurs ciblés sont ceux où l’IA peut avoir un impact rapide et structurant : santé, agriculture, services financiers, administration publique. Des cas d’usage comme les diagnostics assistés, la médecine personnalisée ou l’automatisation des services administratifs sont identifiés comme prioritaires, avec une attention particulière à la gestion des risques éthiques.
La stratégie prévoit par ailleurs le développement d’une infrastructure numérique nationale robuste, appuyée sur des partenariats public-privé. Centres de données, ressources en nuage et pôles de recherche technologique seront au cœur de cette transformation. Ces investissements pourraient ouvrir des débouchés commerciaux importants, tout en suscitant de nouvelles exigences en matière de conformité, notamment pour les fournisseurs de cloud et les opérateurs télécoms.
Bien que le texte n’ait pas de portée juridique immédiate, il trace les contours d’un futur cadre de régulation de l’IA au Kenya. La stratégie aborde des thèmes sensibles comme la classification des risques, la surveillance réglementaire ou encore la gouvernance algorithmique.
Avec ce document, le Kenya entend s’imposer comme un acteur clé du débat africain sur l’IA. Alors que d’autres pays du continent comme le Nigeria, le Rwanda ou l’Algérie ont déjà adopté leurs propres stratégies nationales, Nairobi veut affirmer sa vision, renforcer ses partenariats internationaux et anticiper les normes à venir. La stratégie s’aligne ainsi sur plusieurs initiatives continentales, notamment celles portées par l’Union africaine, la Communauté de l’Afrique de l’Est (EAC) ou l’Alliance Africa Smart.
Le défi sera d’opérationnaliser cette vision. Le succès pourrait dépendre de la capacité à mobiliser des investissements publics et privés, à établir une gouvernance ouverte mais rigoureuse, et à renforcer les compétences locales, notamment par la formation, la recherche et le développement de pôles technologiques.
Samira Njoya
(Source : WeAreTechAfrica, 2 mai 2025)