Le e-Dirham, future monnaie numérique : BAM accélère sa mue digitale
mercredi 23 juillet 2025
Alors que les monnaies numériques gagnent du terrain dans le monde entier, le Royaume affine ses préparatifs pour lancer son propre e-Dirham.
Lors du conseil de Bank Al-Maghrib (BAM) tenu le 24 septembre dernier, le wali de la Banque centrale, Abdellatif Jouahri, a confirmé que « l’e-Dirham était en cours d’étude, mais son lancement reste un projet de long terme ».
Une déclaration qui traduit à la fois la prudence et l’ambition de BAM, face à une tendance mondiale irréversible, la dématérialisation de la monnaie, écrit le magazine hebdomadaire Challenge.
Depuis quelques années, la monnaie digitale figure parmi les priorités stratégiques de BAM.
À l’occasion du séminaire continental de l’Association des Banques centrales africaines (ABCA), consacré cette année aux cyber-risques et aux technologies financières innovantes, Jouahri a levé le voile sur l’état d’avancement de ce chantier.
« La monnaie digitale de Banque centrale (MDBC), en tant que monnaie souveraine, peut constituer une option de paiement numérique, à la fois pour les transactions de gros et de détail », a-t-il souligné.
Les premières expérimentations sont déjà en cours. Après un pilote centré sur le paiement de détail entre particuliers, BAM collabore désormais avec la Banque centrale d’Égypte pour tester l’usage du e-Dirham dans les transferts transfrontaliers.
Un projet mené avec le soutien de la Banque mondiale, qui doit être complété par une analyse approfondie des aspects juridiques et réglementaires.
Pour BAM, la digitalisation de la monnaie nationale répond à plusieurs objectifs : moderniser le système de paiement, sécuriser les transactions, et surtout reprendre la main, face à des monnaies virtuelles privées comme le Bitcoin.
Contrairement aux cryptomonnaies, le e-Dirham restera émis et contrôlé par une institution centrale, gage de stabilité et de traçabilité. « Là où le Bitcoin est décentralisé et échappe au contrôle des autorités monétaires, le e-Dirham offre un cadre sécurisé et régulé », analyse Ahmed Khaouja, expert en technologies de l’information, cité par le magazine hebdomadaire.
Une logique comparable anime d’autres banques centrales, à commencer par la Banque centrale européenne, qui planche sur le projet d’un e-Euro, pour préserver la souveraineté monétaire de l’UE face aux géants du numérique et aux crypto-actifs.
Avec le e-Dirham, BAM espère aussi s’attaquer au défi structurel qu’est la forte dépendance du Royaume à l’argent liquide.
L’idée est de simplifier le quotidien des citoyens et des entreprises, en facilitant le règlement de taxes, de frais administratifs ou de services publics par voie électronique. « Demain, payer ses impôts ou ses factures pourrait se faire en quelques clics, sans manipulation de cash », a souligné un banquier central, sous couvert d’anonymat, également cité par le magazine hebdomadaire.
Au-delà de la praticité, l’enjeu est aussi fiscal. Un e-Dirham généralisé permettrait une meilleure traçabilité des flux financiers, limitant ainsi l’informel et les transactions échappant au radar de l’administration.
Si la Banque centrale avance prudemment, c’est qu’elle sait que la réussite d’une telle innovation ne tient pas seulement à la technologie. La confiance du public, la cybersécurité et l’adaptation du cadre réglementaire sont autant de préalables à lever avant un déploiement à grande échelle. « Nous nous préparons à ne pas être dépassés, car le monde est en transition rapide et constante vers l’économie numérique. Quand le moment sera venu, nous serons prêts », a assuré Jouahri, devant l’ABCA.
(Source : [Le 360_>https://fr.le360.ma/], 23 juillet 2025)