IA et langues locales : le Burkina Faso veut former sa population à une tech inclusive
mercredi 9 juillet 2025
Face aux défis que rencontre le Burkina Faso dans le développement de solutions d’intelligence artificielle adaptées à ses réalités, une approche innovante émerge pour démocratiser l’IA : intégrer les langues locales afin d’élargir l’accès aux technologies et dynamiser l’emploi des jeunes.
En partenariat avec le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), le ministère de la Transition numérique a organisé, le vendredi 4 juillet, une réunion de concertation sur la promotion de l’IA dans les langues locales du pays.
Cette démarche entend rendre l’IA accessible à une majorité de Burkinabè souvent exclus des progrès numériques à cause des barrières linguistiques. Parallèlement, elle soutient la formation de jeunes techniciens à un usage responsable et éthique de ces technologies, ce qui favorise l’inclusion numérique et la création d’emplois locaux.
Comme le souligne Eloi Kouadio IV, représentant résident adjoint du PNUD au Burkina Faso : « cette initiative valorise l’intelligence artificielle tout en anticipant ses dérives. Elle intègre des dimensions réglementaires et éthiques, avec un accent sur le renforcement des compétences des techniciens pour une IA responsable. La digitalisation des langues locales est cruciale pour rendre cette technologie accessible à la majorité des populations ».
Avec un peu plus de 16 millions d’habitants, soit 72,4 % de la population burkinabè vivant en milieu rural selon un rapport 2022 de l’Institut national de la statistique et de la démographie (INSD), la numérisation des langues locales devient un levier clé pour faciliter l’appropriation de l’IA. Cette stratégie ouvre des perspectives concrètes pour améliorer l’accès à l’éducation numérique et aux services publics digitaux.
En formant la jeunesse à ces innovations, le Burkina Faso prépare une main-d’œuvre qualifiée prête à répondre aux besoins du secteur technologique, contribuant ainsi à la croissance économique nationale.
Le succès de cette initiative repose sur la formation des formateurs, un cadre réglementaire solide et l’adhésion des acteurs locaux. D’autres pays africains, comme le Kenya et le Rwanda, ont lancé des projets similaires avec des résultats encourageants.
Au Kenya, Simba AI développe un chatbot multilingue qui traduit l’anglais en langues locales telles que le Kikuyu, le Meru et le Kalenjin. Cette innovation facilite l’accès à l’IA pour des populations souvent exclues, tout en valorisant les langues indigènes et en créant des opportunités pour les jeunes développeurs.
Au Rwanda, l’application Mbaza a joué un rôle clé durant la pandémie de Covid-19, diffusant des informations via un chatbot multilingue, notamment en Kinyarwanda. Ce projet collecte aussi des données linguistiques essentielles pour adapter l’IA au contexte local et aux besoins des populations.
Pour le Burkina Faso, la prochaine étape consistera à généraliser l’usage de ces outils dans les écoles et à renforcer les synergies entre les secteurs public et privé afin de stimuler l’innovation. Cette stratégie pourrait positionner le pays comme un leader régional de l’IA inclusive au service d’un développement équitable.
Félicien Houindo Lokossou
(Source : Agence Ecofin, 9 juillet 2025)