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Accueil > Articles de presse > Archives 1999-2024 > Année 2024 > Février 2024 > Ibrahima Nour Eddine Diagne, économiste et expert en transformation digitale (…)

Ibrahima Nour Eddine Diagne, économiste et expert en transformation digitale : “Autoriser les manifestations ou les encadrer est plus salutaire que pénaliser toute une économie en opérant des restrictions sur l’Internet. “

mardi 20 février 2024

Portrait/Entretien

Expert reconnu de la science économique, auteur de plusieurs publications sur le commerce électronique et le développement en Afrique, initiateur des Mardis du Numérique, puis de la Rentrée Numérique, Ibrahima Nour Eddine Diagne n’est plus, depuis longtemps déjà, quelqu’un à présenter au sein de l’écosystème technologique international. Son expertise sur les questions de transformation digitale, de facilitation du commerce, d’intégration régionale, de conduite du changement ou encore des relations internationales l’a porté jusqu’au très prestigieux poste de Rapporteur pour l’Afrique de la United Nations Center for Electronic Transactions qu’il a quitté en avril 2019. Dans cette interview, l’Administrateur général de GAINDE 2000 livre son regard sur les restrictions d’Internet au Sénégal et leur impact dans tous les secteurs de l’économie, non sans plaider, de nouveau, pour la mise en place d’Observatoires, pour mieux les mesurer. La startup Act et le maintien des talents sont également au menu.

Le Tech Observateur : L’actualité a encore été marquée par les restrictions de l’Internet mobile décidées par l’État du Sénégal, suite au report de la présidence par Macky Sall. Comment comprenez-vous la persistance des autorités ?

Ibrahima Nour Eddine Diagne : Je pense qu’on ignore la part du digital dans l’économie et c’est inquiétant parce qu’on prend pour prétexte un fait politique pour déstructurer une partie importante de l’économie et du social. Comme vous le savez sans doute, nos pays sont aujourd’hui très dépendants des réseaux sociaux pour des questions à la fois sociale et économique. Tous les secteurs sont concernés. Si nous prenons le cas de la santé, certains recevront le conseil de leur médecin ou leur ordonnance par le digital. Ainsi, il semble évident qu’on sous-estime l’ampleur et l’importance du digital à la fois dans l’économie et dans la stabilité de notre pays.

Alors, si on analyse cela juste sous l’angle de la sécurité en disant qu’elle est en jeu lorsque le digital est ouvert, c’est qu’on appréhende mal tout ce qui est déterminé par le digital dans l’économie et dans la stabilité sociale du pays. Ce n’est pas parce que les gens ne savent pas ce qui se passe et sont incapables de se connecter qu’on aura plus de sécurité. A bien y réfléchir, c’est quand n’a pas accès à l’information qu’on s’expose justement à l’insécurité. J’avais d’ailleurs rédigé, à l’époque des premières coupures d’Internet, une contribution pour dire que la première fois, on pouvait comprendre que l’État n’avait pas les outils de mesure de l’impact de telles restrictions. Je trouve que c’est vraiment dommage pour un pays comme le Sénégal, aussi fragile et où l’économie solidaire est quelque chose qui stabilise justement le social, que l’État décide, sans préavis, de couper l’Internet mobile. Je ne peux pas vous dire, personnellement, les contraintes que cette coupure inattendue a eues sur moi. En revanche, sur le plan professionnel, c’est au moins 40% d’activités en moins à chaque fois que ces restrictions sont décidées. Donc, il est établi, et tous les acteurs économiques en conviennent, que les restrictions inopinées d’Internet ont des effets très négatifs sur l’activité économique.

Le Tech Observateur : La connectivité est au cœur de toutes les stratégies digitales dans notre pays et en même temps, l’on hésite pas à freiner Internet. Une contradiction à vos yeux ?

Ibrahima Nour Eddine Diagne : Si aujourd’hui, il fallait couper l’électricité pour mettre le pays en sécurité, vous pensez qu’on l’aurait fait sur une période de 24 heures ? Vous pensez qu’on mettrait les dispensaires et les chambres froides à l’arrêt ? Tout le monde a compris que quel que soit l’enjeu, on ne doit pas couper l’électricité de tout le pays pour une question politique simplement parce qu’il y a des marches interdites ou pas. Et c’est la même chose pour l’internet, parce ce que, pour ce qui est de l’électricité, on connait l’impact que cela pourrait engendrer. Mais malheureusement, ce n’est pas le cas pour l’Internet. Les gens peuvent estimer que c’est juste un petit luxe alors qu’aujourd’hui, c’est une déterminante de la vie sociale et de la vie économique de tout pays. Et donc, j’avais appelé à l’époque qu’on mette en place des observatoires pour mesurer ces impacts et lorsque les décideurs sont autour d’une table et qu’il y ait une menace sécuritaire, qu’ils puissent savoir que s’ils procèdent à des restrictions de l’Internet, qu’ils aient en même temps conscience des dégâts économiques que cela va provoquer. En effet, une journée sans Internet, c’est de nouveaux pauvres, de nouveaux chômeurs et de nouvelles personnes plongées dans la précarité.

Le Tech Observateur : Dernièrement, vous avez plaidé pour des observatoires. Ça veut dire quoi exactement ?

Ibrahima Nour Eddine Diagne : En fait, on manque d’éléments pour mesurer l’impact du numérique, à la fois sur l’économie et sur le social. Souvent, on agite le chiffre d’affaire des opérateurs ou le nombre de kilomètres de fibre optique, etc. Les indicateurs que nous avons ne sont pas des indicateurs d’usage. Ce sont des indicateurs d’infrastructures. Donc, quand on nous demande aujourd’hui combien coûte une journée sans Internet au Sénégal, la seule réponse que les gens pourront donner, c’est la perte de chiffre d’affaire des opérateurs alors que cet indicateur ne représente absolument rien par rapport à ce que l’économie perd. Et je reprends toujours une étude de l’Université d’Oxford qui date de cinq ans et qui avait fait ressortir que le poids du digital dans une économie comme l’Angleterre représentait 33% du PIB. Peut-être même qu’aujourd’hui, ça représente beaucoup plus. Les finances sont digitales, de même que l’assurance, le transport, la santé, le tourisme… Et tous ces secteurs roulent avec un intrant digital. Donc, si on coupait en Angleterre l’Internet pendant une journée, on couperait près de 40% de l’économie britannique sur une seule et unique journée. Et ça se chiffrerait en milliards de dollars.

Le Tech Observateur : Beaucoup estiment évidemment qu’il y a un manque à gagner énorme en jeu. Les victimes seraient fondées à exiger des réparations financières ?

Ibrahima Nour Eddine Diagne : Absolument, ce serait tout à fait justifiable. Mais serait-il pertinent de pousser l’État à indemniser ? Il n’y a pas que les opérateurs qui sont victimes de ces restrictions, mais bien tous les acteurs économiques. Moi, je préfère discuter avec un État qui va mettre en place des logiques inclusives pour protéger l’économie digitale. Si la sécurité est menacée, nous sommes tous concernés et volontaires pour que des mesures soient prises pour la maintenir. S’il n’y a pas de sécurité, il n’y a pas de confort. Donc, tout ce qui peut être fait dans un pays en termes d’économie repose sur la sécurité.

Autoriser les manifestations ou les encadrer est plus salutaire que pénaliser toute une économie en opérant des restrictions sur Internet. Pour en revenir à votre question, l’Etat n’a pas les moyens pour une indemnisation globale de tous les impactés. En revanche, l’Etat doit nécessairement considérer le fait économique dans toutes ses prises de décision liées à la restriction de l’Internet. On peut dire que des restrictions ciblées, sélectives, calibrées sur des créneaux horaires, des zones géographiques ou sur des outils et des contenus peuvent produire l’effet recherché en matière de sécurité sans pour autant anéantir l’économie.

Le Tech Observateur : Toujours sur ces aspects économiques, les startups attendent toujours l’opérationnalisation de la Startup Act. Vous pensez que ça pourrait faire bouger un peu les lignes ?

Ibrahima Nour Eddine Diagne : Si cette loi-là a été actée et qu’elle n’est pas opérationnelle, ça révèle encore une fois une certaine incohérence. Ce type de lois, lorsqu’elles sont actées, c’est qu’elles relèvent d’une urgence et donc on peut s’étonner que leur application prenne autant de temps. Cette loi sur les startups finit pas être oubliée par ceux pour qui elle a été votée. Ceux qui l’attendaient pour investir ont dû changer leur plan et sans doute, ont traversé des périodes difficiles en tant qu’entrepreneur. Moi je pense qu’il vaut mieux n’avoir aucune loi que d’avoir des lois qu’on vote et qui restent dans l’antichambre, entre les décrets, les arrêtés d’application et tout le reste. Il vaut mieux ne pas avoir de lois et fonctionner tel quel que d’avoir des lois qui ne sont pas opérationnelles. Des pays comme le Rwanda et le Maroc ont déjà montré la voix avec une meilleure cohérence dans leur démarche vis-à-vis du numérique.

Le Tech Observateur : Dans un monde globalisé où nos expertises locales sont plus que jamais demandées à l’étranger, comment maintenir les talents ?

Ibrahima Nour Eddine Diagne : Vous savez, les compétences, on en a toujours eues et on en aura encore tout comme les autres pays africains. Notre problème en Afrique, c’est qu’on n’a pas de dynamiques logiques, on a des incohérences, on a des stratégies qui redoublent, qui se répètent, qui se déclarent convergentes mais qui sont totalement concurrentes. Rien qu’au Sénégal, vous avez beaucoup d’incohérences dans la construction de l’économie numérique. Sur des dossiers comme la santé digitale, on traîne le pas depuis plus 15 ans, sans avancer, ni sur le plan réglementaire, ni sur la pratique. Ces incohérences répétées incitent les compétences qui ne trouvent pas d’espace d’expression de leur savoir-faire à quitter leurs frontières pour aller vers des marchés beaucoup plus cohérents sur lesquels ils peuvent s’épanouir professionnellement. Tant que cette question ne sera pas résolue, nous nous pourrons pas capter et conserver nos meilleurs talents. Certains d’entre eux choisiront néanmoins de rester au pays par simple amour de la patrie ou par nécessité familiale.

Le Tech Observateur : Comment comprendre dans un pays où il est beaucoup question de souveraineté digitale que l’Etat se tourne le plus souvent vers l’étranger pour les gros chantiers ?

Ibrahima Nour Eddine Diagne : Il faut d’abord savoir que c’est une question de politique d’achat public. La politique d’achat public doit mettre les entreprises nationales en première ligne lorsqu’il s’agit de compétences pour lesquelles nous avons l’expertise. Lorsqu’il s’agira de technologies pour lesquelles nous n’avons pas d’industrie, nos politiques d’achat public devraient donc susciter des alliances avec les constructeurs de rang mondial et ne pas simplement cantonner les entreprises locales dans une posture de sous-traitant. Cette situation n’est pas propre au Sénégal. Elle doit nécessairement être corrigée pour permettre l’éclosion d’un écosystème et d’une industrie numériques. A mon avis, il serait souhaitable de revoir, d’une part, toute notre politique d’achat public pour positionner les entreprises sénégalaises dans la construction numérique du Sénégal et , d’autre part, avoir une stratégie de développement du secteur numérique très cohérente et bien articulée.

(Source : Le Techobservateur, 20 février 2024)

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