S’il reste encore quelques incrédules saisis de doute qui se demandent à quoi sert Internet, surtout lorsqu’il s’applique à nos pays sous-développés, les producteurs horticoles sénégalais, qui ont expérimenté sur leurs téléphones portables un service d’observatoire de prix des marchés de Dakar, ne sont certainement pas du lot. Pendant plusieurs mois, certains d’entre eux ont expérimenté, un peu à la manière de bêta-testeurs, le service Wap développé par la société Manobi-France, une entreprise de recherche et développement à capitaux français et sénégalais.
Grâce à un navigateur approprié, le Wap permet de bénéficier des services Internet via un téléphone portable. Manobi-France a conclu, il y a trois semaines, après de longs mois de préparation ponctués d’accords divers, un partenariat plus engagé avec la Sonatel, qui prend la forme de la société Manobi-Sénégal (Manobi France 66%, Sonatel 34%) dont l’objectif est d’exploiter et de mettre en œuvre les services de haute technologie qu’elle développe.
En fait, les activités visibles de Manobi ont débuté depuis septembre 2001 auprès, d’abord, d’une quinzaine de producteurs agricoles de Sébikhotane. (Voir notre dossier "Une journée chez les premiers usagers sénégalais du WAP" ("Le Soleil" du 3 novembre 2001). L’idée à la base, toute simple, était de mettre à leur disposition les prix pratiqués dans les principaux marchés de Dakar (Castors, Dalifort, Sandiniéry, Thiaroye et Tilène) pour leur permettre de mieux écouler leur production. Consultables pratiquement en temps réel, grâce au travail de ses neuf collecteurs de prix qui les "balancent" chaque jour dans la base de données développée par Manobi, ces prix s’affichent pour les abonnés au service sur des terminaux aussi divers qu’un micro-ordinateur, un pocket PC ou un téléphone portable.
Selon les promoteurs de la société, les cinq mois de campagne d’expérimentation de Manobi l’année dernière, de décembre 2001 à avril 2002, auraient permis à une soixantaine d’horticulteurs d’engranger la bagatelle de 110 millions de Fcfa de gains supplémentaires par rapport à leurs revenus habituels, ce qui correspond, toujours selon Manobi, à un chiffre d’affaires moyen de 2 millions de Fcfa supplémentaire par producteur. Voilà sans doute pourquoi l’un d’eux affirme qu’il a gagné au cours de cette période "suffisamment d’argent [pour] partir en vacances pendant deux semaines dans [son] village natal". Ce qu’il n’avait fait depuis dix ans…
Daniel Annerose, concepteur et directeur général de Manobi-France et de Manobi-Sénégal, apparaît très optimiste. Pour lui, si l’expérience est étendue à l’ensemble de la zone horticole des Niayes, c’est plus de 7 milliards de Fcfa supplémentaires par campagne qui pourraient revenir dans l’escarcelle des horticulteurs. Mieux, affirme-t-il, ce ne sont pas seulement les producteurs qui bénéficieraient du service : "L’amélioration du prix de vente obtenue par le producteur doit aussi trouver son pendant par une augmentation des revenus des bana-banas (les intermédiaires, les grossistes) grâce à un renforcement de leur capacité à identifier la demande des marchés, à connaître l’offre des producteurs et à saisir les opportunités qui en résultent". Le directeur général de Manobi estime, par ailleurs, le potentiel d’utilisateurs des services de sa société entre 4000 et 5000 abonnés (agriculteurs, pêcheurs et intermédiaires).
La Sonatel, qui détient le tiers des actions de Manobi, ne nous avait pas particulièrement habitués à s’intéresser de près à des produits ou services qui pouvaient apparaître comme "compliqués" pour un opérateur "traditionnel" de télécommunications. Avec cette implication directe, elle indique qu’elle veut aussi s’investir dans d’autres stratégies moins évidentes a priori, mais plus innovantes. Même si, ici, "l’intelligence" est fournie par son partenaire, l’opérateur de télécommunications se contentant d’apporter sa "puissance" et son réseau d’abonnés au mobile et à l’Internet.
Il est à noter que, pour l’utilisation de cet observatoire des prix, Manobi ne facture pas directement à ses abonnés, mais est rémunéré par la Sonatel sur le trafic généré. C’est un système de collaboration qu’ont revendiqué certains fournisseurs d’accès à Internet (Fai) et auquel la Sonatel, semble-t-il, n’a jamais accédé. Va-t-elle un jour étendre cette nouvelle vision aux fournisseurs d’accès à Internet, voire aux stations de radio qui, grâce aux émissions interactives, génèrent aussi quantité d’appels téléphoniques ? Ou ne la réserve-t-elle qu’aux entreprises dans lesquelles elle est directement partie prenante ? Question intéressante…
Manobi Sénégal devrait officiellement lancer ses activités en fin janvier/début février, avec la présentation d’autres services (observatoire des prix des produits de la pêche, guide des bonnes pratiques, infotraçabilité, messageries, gestion des ressources, etc.). Voilà, en tout cas, une initiative éminemment digne d’intérêt dans le secteur des nouvelles technologies, qui cadre parfaitement avec la recherche, par ailleurs affichée par les autorités, mais pas encore réussie, d’une agriculture modernisée. Les problèmes que connaît le monde rural mettent encore plus de lumière sur ce service high-tech destiné aux agriculteurs.
ALAIN JUST COLY
(Source : Le Soleil 10 janvier 2003)
Bande passante internationale : 172 Gbps
4 FAI (Orange, Arc Télécom, Waw Télécom et Africa Access)
19 266 179 abonnés Internet
Liaisons louées : 3971
Taux de pénétration des services Internet : 106,84%
3 opérateurs : Sonatel, Expresso et Saga Africa Holdings Limited
382 721 abonnés
336 817 résidentiels (88,01%)
45 904 professionnels (11,99%)
Taux de pénétration : 1,67%
3 opérateurs (Orange, Free et Expresso)
21 889 688 abonnés
Taux de pénétration : 123,34%
3 050 000 utilisateurs
Taux de pénétration : 17,4%
Facebook : 2 600 000
Facebook Messenger : 675 200
Instagram : 931 500
LinkedIn : 930 000
Twitter : 300 000