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Numérique : l’Afrique fait recette à La Réunion

mardi 10 octobre 2017

La première édition du forum avait permis de conclure une cinquantaine d’accords entre des entreprises de La Réunion ou de la métropole et des entreprises africaines. Quatre entreprises se sont ensuite installées à La Réunion, entreprises spécialisées en conseil, financement, aménagement des smart-cities dans les transports. « Elles manquaient dans l’écosystème local », se réjouit Philippe Arnaud. L’ambition de cette seconde édition a été claire, « s’ouvrir à cinq filières dans lesquelles le numérique est un vrai levier de croissance : l’industrie, l’agriculture, la santé, le tourisme, les villes et bâtiments. L’Afrique est ainsi un secteur de tourisme immense encore assez peu fréquenté par le flux touristique mondial. Ces thématiques sont sélectionnées selon ce qui frémit sur le terrain, ce qui nous est rapporté par les entrepreneurs. »

Dans la nouvelle économie qui émerge déjà, le numérique sera la colonne vertébrale de toute activité. Certains économistes annoncent la quatrième révolution industrielle où les datas ou l’exploitation des données seront les moteurs et les premières sources des richesses de demain. Le numérique y sera alors un formidable accélérateur des industries et services dits traditionnels, notamment dans les secteurs du tourisme, de l’agriculture, de la santé… Autant de secteurs qui ajoutent un « e » en préfixe indicateur d’un boom économique (e-santé, e-agriculture, e-tourisme). Cette révolution est déjà ancrée et il apparaît que, dans bien des domaines, l’Afrique en impulse bien des innovations.

« Le numérique est un vecteur de croissance pour l’Afrique mais aussi de développement humain, analyse pour sa part David Guèye, directeur du développement du CIO Mag, un support d’information et de veille technologique spécialisé sur l’Afrique. « C’est une idée qui a mis du temps à émerger, mais elle s’installe de plus en plus. Elle devient une des priorités des politiques et des entreprises. Ce phénomène a mis du temps, car l’Afrique avait d’autres priorités liées à la sécurité, à la santé, à l’agriculture. Mais nous assistons à un changement de paradigme et le numérique est aujourd’hui considéré comme une solution à toutes ces problématiques. » Selon ce jeune témoin de la scène numérique africaine, « l’Afrique à quelque chose de formidable à offrir au monde : le digital social ».

Il tient pour exemple l’hackathon AgriPME qui a eu lieu au Togo, dans le cadre du Digital African Tour 2017, ce concours national d’innovation à destination des entrepreneurs locaux où ils ont dû développer une application permettant d’améliorer la vie des agriculteurs. Cinq entrepreneurs de même pas 30 ans ont remporté le 1er prix en développant une solution permettant au gouvernement de mieux recenser les agriculteurs et de leur verser via le téléphone leurs subventions, évitant ainsi des déplacements inutiles, coûteux et chronophages. La solution E-agribusiness sélectionnée lors de ce hackathon permettait aussi aux agriculteurs d’être informés en temps réel de la météo et de l’évolution du prix des marchés. Enfin, et c’est ce qui a fait la différence auprès du jury, cette solution numérique intègre un système de messagerie vocale en éwé, la principale langue du pays. Une solution à l’africaine. Grâce à leur connaissance des réalités du terrain, les entrepreneurs ont intégré la donnée qu’une bonne partie des paysans visés étaient analphabètes. Dans un pays où 52 % de la population active travaille dans le secteur primaire, ces jeunes ont ainsi montré que l’agriculture, considérée comme le monde d’hier, et le numérique, comme celui de demain, peuvent très bien se combiner en Afrique », conclut-il.

C’est dans ce sens que le continent a su faire de ses handicaps des atouts indéniables. La dématérialisation inhérente à cette économie 3.0 permettant de contourner les obstacles géographiques liés à l’immensité du continent et à son manque parfois d’infrastructures. L’exemple le plus probant est celui du paiement par mobile. Là où, dans l’économie traditionnelle, la faible bancarisation des Africains constituait un frein évident à la croissance, les Africains, sous l’impulsion kenyane, ont su utiliser la téléphonie pour faciliter transactions financières, paiements et microcrédits.

Autre exemple de cette faculté d’adaptation africaine à l’économie souple du numérique, celui, en Tunisie, des villes intelligentes. Deux cents maisons tunisiennes sont déjà connectées, ce qui permet de récolter les datas nécessaires à l’offre de services toujours plus personnalisés, dans une vaste expérience in vivo. Amine Chouaieb, entrepreneur tunisien, a ainsi présenté lors de ce Forum NxSE la ville de demain, faite d’objets connectés recueillant en temps réel les datas, la domotique ayant toute sa place pour une amélioration constante des services offerts. Cependant, l’économie numérique ne veut pas se contenter d’utiliser les datas comme un levier prédictif, mais réellement prescriptif, voire normatif. Amine Chouaieb rappelle ainsi à un auditoire étonné qu’« on peut prédire les choix d’une personne avant qu’elle ne le sache elle-même. Par exemple, par la segmentation de ses données, on arrive à faire changer d’habitude de consommation à près de 30 % des gens visés, pour peu qu’on leur adresse le bon message au bon moment ». L’entrepreneur tunisien note ainsi que déjà les Gafam (Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft) s’intéressent aux villes connectées. Rapporté à l’Afrique, cet intérêt est d’autant plus vif que « la moyenne d’utilisation sur le continent du réseau Facebook est de 6 heures par jour et par personne inscrite », rappelle l’entrepreneur tunisien, et que le continent est un immense marché avec une classe moyenne émergente et dynamique.

La Réunion, laboratoire de l’e-santé mondiale

Autre sujet de développement numérique primordial pour l’Afrique, celui de la santé, ou plutôt de l’e-santé. La santé connectée est un secteur émergent et dynamique, et déjà plus de 150 000 applications directement liées à cette problématique existent dans le monde. En Afrique, les problématiques liées aux médicaments contrefaits sont pandémiques. Selon l’Organisation mondiale de la santé, les faux médicaments sont un fléau qui tue aussi, puisque 22 à 85 % de la population africaine sont exposés aux faux médicaments et que 10 à 40 % des médicaments vendus dans les rues sont falsifiés.

Des idées innovantes ont été présentées à NxSE, tenant compte de la réalité africaine et de l’usage pluriel fait du téléphone portable, dans un continent devenu le deuxième marché mondial de la téléphonie mobile. Ainsi a été créé un système d’étiquette à gratter sur chaque boîte de médicaments, ce qui permet à tout usager d’envoyer par SMS le numéro unique ainsi révélé et de recevoir confirmation ou pas de la contrefaçon du médicament. Une innovation que seul le numérique pouvait permettre.

Autre secteur africain saisi par la fièvre numérique, celui de l’agriculture. Dans ce secteur aussi, l’information se révèle fondamentale. Le numérique y réussit le tour de force d’allier en synergie datas satellitaires en temps réel et connaissances ancestrales accumulées pendant des millénaires. Les datas satellitaires permettent ainsi d’indiquer aux agriculteurs quand, quoi et où semer. La prévision météorologique est également utilisée. Mais pas seulement puisque les datas permettent de mesurer l’eau déjà présente dans chaque parcelle, avec précision, ce qui permet d’ajuster au mieux, sans gaspillage, l’arrosage des semis. Toute la problématique a été de savoir comment diffuser ces informations disponibles auprès des agriculteurs. Là encore, l’usage des portables est au centre de la réponse apportée puisque les agriculteurs reçoivent des messages ajustés et personnalisés à leur cas singulier.

Le numérique bouleverse ainsi profondément les échelles de valeurs et les écosystèmes et permet de faire sauter, en rythme accéléré, des étapes aux trajectoires de développement de l’Afrique. Inclusive et dématérialisée, cette révolution numérique en marche est en passe de faire de l’Afrique une de ses locomotives. Locomotive à laquelle s’amarrent les économies environnantes, comme le Forum NxSE l’a bien illustré.

Hassina Mechaï

(Source : Le Point Afrique, 10 octobre 2017)

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