Pour ne pas subir les conséquences parfois néfastes de la cybercriminalité, les forces de sécurité et les pays doivent faire de la prospective. C’est l’avis du Pr Abdallah Cissé qui animait une conférence sur la cybercriminalité à l’Ecole de police. L’absence de prospective est à l’origine, dit-il, du sous-développement de l’Afrique.
Le professeur de droit et avocat à la Cour, Me Abdallah Cissé, a animé une conférence sur la cybercriminalité organisée hier par la 42e promotion de l’Ecole nationale de police (Enp). En effet, avec la révolution numérique, tout se résume désormais aux nouvelles technologies de l’information et de la communication (la communication, la sécurité etc.) Cependant, de nouvelles formes d’attaques et d’infractions accompagnent la révolution du numérique. D’où l’importance de la prospective, indique le conférencier, pour parer aux nouvelles formes d’attaque. « La prospective, c’est se préparer à un avenir qu’on ne subit pas. La prospective, c’est ce qui différencie un homme d’un mouton », explique le Pr Cissé qui considère que la méconnaissance de la prospective est la principale cause du sous-développement dans le continent noir. « Un pays qui ne fait pas de prospective est un pays qui fait un pilotage à vue. Le plus gros risque qui le guette, c’est d’être surpris par les délinquants. Il y a des surprises qui sont joyeuses, mais il y a également des surprises qui sont fatales, parfois funestes, parce que tout simplement on ne s’est pas projeté », ajoute le conférencier.
Mieux, il estime que si les occidentaux sont en avance sur l’Afrique, c’est parce qu’ils gèrent l’avenir, pendant que le continent noir continue à gérer le présent et le passé. « Quelqu’un qui gère votre avenir, vous domine », souligne-t-il. Il est également revenu sur les défis qui attendent les forces de sécurité devant le phénomène de la cybercriminalité. « Pour répondre aux défis, il faut avoir les capacités, il faut se former, il faut avoir de la technologie, il faut aussi coopérer. Avant, les forces de l’ordre coopéraient avec la justice, aujourd’hui, la coopération se fait entre institutions judiciaires, entre les forces de l’ordre et de sécurité, mais aussi en y incluant le niveau politique, le niveau diplomatique et le niveau technologique », indique Me Cissé. Par ailleurs, il se désole que le Sénégal n’ait pas un institut de prospective, alors que le président Senghor, dès 1959, faisait partie du conseil d’administration de l’institut « Futirible » de Paris spécialisé dans la prospective. De plus, le Président-poète avait projeté un institut de prospective lors de la pose de la première pierre de l’université Gaston Berger, en 1971. « Ce qui est surprenant, c’est que jusqu’à présent, le Sénégal n’a pas d’institut de prospective », se désole-t-il.
Cybercriminalité et respect des données personnelles des citoyens
Pour lutter contre la cybercriminalité, les forces de l’ordre ne doivent pas empiéter sur les données personnelles des citoyens avec les nouvelles technologies de l’information et de la communication. « En matière de traitement de données portant sur les citoyens sénégalais, la police a certaines contraintes qui sont légales. Avant de créer une base de données sur les Sénégalais, la police a l’obligation d’obtenir une autorisation de la Commission de protection des données personnelles. La police a également l’obligation d’avoir un acte réglementaire avant la consultation de tout fichier portant sur les Sénégalais, y compris une base de données de criminels », renseigne Dr. Mouhamadou Lo. Dans la foulée, il ajoute qu’il n’est pas difficile de concilier la lutte contre la cybercriminalité et le respect des droits des citoyens. « Les individus se sont battus pendant des siècles pour avoir ces droits. Ce n’est pas parce que la cybercriminalité est là qu’on doit les bafouer. La police a l’obligation de respecter les lois et règlements dans ce pays, même dans le cadre de ses enquêtes les plus pointues », tranche
Mouhamadou Lo.Moussa Ciss
(Source : L’As, 25 avril 2016)
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