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Lamine Badji, secrétaire national chargé des revendications du syndicat des travailleurs de Sonatel : « L’externalisation des activités techniques fera passer Sonatel d’une entreprise de télécommunications à celle de services »

vendredi 19 février 2016

Le Secrétaire national chargé des revendications accuse France Télécom de bloquer tout projet d’acquisition de filiale par Sonatel, en dehors du Mali, de la République de Guinée et de Guinée. Il soutient que la multinationale se comporte en concurrent et exerce un contrôle absolu sur l’entreprise alors qu’elle est en réalité un partenaire. Il appelle l’Etat à jouer son rôle d’arbitre en faisant respecter le pacte d’actionnariat.

Les travailleurs de la Sonatel ont décrété 48 heures de grève renouvelables. Quelles sont les raisons de votre mouvement d’humeur ?

L’intersyndicale de Sonatel a décrété 48 heures renouvelables qui prennent effet à partir de ce jour (Ndr : hier). Les raisons de ce mouvement d’humeur sont d’ordre patriotique et de souveraineté nationale. La multinationale France Télécom s’est engagée, depuis quelques années, dans la mise en œuvre de projets d’optimisation des réseaux de télécommunications de ses filiales ou partenaires dans la zone Amea (projets ANO). De tels projets dans leur constitution sont de nature à changer structurellement les réseaux des télécommunications des pays avec un impact significatif sur l’économie et la souveraineté de ces pays. Et cela au mépris des objectifs fondamentaux clairement déclinés dans la convention de concession et le pacte de partenariat, si nous prenons le cas du Sénégal. Considérant le non-respect des principes fondamentaux de souveraineté des Etats sur les réseaux de télécommunications des opérateurs historiques ; Considérant les risques de perte d’emplois liés à l’externalisation des activités du cœur de métier ; Considérant la perte d’expertise liée à une externalisation des activités techniques et qui fera passer Sonatel d’une entreprise de télécommunications à une entreprise de services ; Considérant les conséquences sur l’écosystème des télécommunications qui peuvent entraîner la faillite de plusieurs Pme/Pmi qui font l’essentiel de leur chiffre d’affaires avec Sonatel ; Considérant la volonté du partenaire stratégique à saborder le navire Sonatel en bloquant la croissance externe pendant 8 ans et à exercer un contrôle absolu sur l’entreprise ; l’Intersyndicale Sonatel a pris cette décision, qui n’est qu’un début si nos préoccupations ne sont pas satisfaites. Elles devraient normalement être celles de l’Etat et de tout le peuple sénégalais si l’on considère le Monde dans son article intitulé « Espionnage : comment Orange et les services secrets coopèrent » posté sur son site web, qui dit : « Cette note, extraite des archives de la NSA par son ex-consultant Edward Snowden, assure que la relation entre la Dgse et l’opérateur français constitue un atout majeur par rapport à ses homologues occidentaux. L’une des forces de la Dgse résiderait dans le fait qu’elle ne se contente pas des autorisations accordées par le législateur pour accéder aux données des clients de France Télécom-Orange. Elle dispose surtout, à l’insu de tout contrôle, d’un accès libre et total à ses réseaux et aux flux de données qui y transitent. Cette collecte libre de tout contrôle, par le biais de l’opérateur français, portant sur des données massives, concerne aussi bien des Français que des étrangers. Elle est utilisée par la Dgse, qui la met à la disposition de l’ensemble des agences de renseignement françaises au titre de la mutualisation du renseignement technique et de sa base de données ». Cette information est-elle vraie ou fausse ? En tout cas, elle mérite d’attirer toute notre vigilance. D’autant que Sonatel est une société sénégalaise qui n’appartient pas à France Télécom.

Au-delà de ces griefs, quelle est la situation qui prévaut actuellement dans votre entreprise ?

La situation actuelle est : France Télécom qui quitte sa place de partenaire pour se comporter en propriétaire faisant la pluie et le beau. Et ce qui nous ulcère dans tout cela, c’est le recul que nous accusons. Car le Sénégal, à travers Sonatel, a été toujours parmi les « first movers » dans le secteur des Télécommunications. En 1985, l’Etat du Sénégal a procédé à la séparation entre la poste et les Télécommunications. Cela grâce à l’intelligence et le génie sénégalais, je veux nommer particulièrement Alassane Dialy Ndiaye. Il fut le premier Directeur général de Sonatel, jeune ingénieur à la Nasa, découvert par le président Abdou Diouf, il contribua à la stratégie de développement des Télécommunications. Ainsi, nous avons devancé la France qui a procédé à cette séparation de la poste des Télécommunications en 1990 mais aussi le Maroc qui l’a fait en 1999.

Pendant la vague de privatisation des sociétés nationales, en 1997, les travailleurs se sont opposés à une libéralisation du secteur et cela contre les recommandations de la Banque mondiale et du Fmi, tout en étant d’accord sur le principe d’une privatisation encadrée. C’est ainsi qu’ils ont formulé le fameux slogan : « Privatisons et ensuite libéralisons ». Cela a permis à Sonatel d’être aujourd’hui le seul opérateur historique en Afrique noire qui est resté vivant et florissant. Car à cette époque, la libéralisation du secteur donnait un avantage certain aux multinationales qui seraient plus compétitives que les opérateurs historiques. Parce que la privatisation encadrée à cette période s’avérait être la meilleure décision si l’on considère le fait que nos Etats étaient de mauvais gestionnaires qui étaient presqu’en faillite. Encadrée cette privatisation était la préoccupation première pour l’Etat du Sénégal de même que les travailleurs. C’est ainsi que France Télécom est entrée dans le capital de Sonatel avec 33% du capital et l’Etat du Sénégal conservant également 33% du capital. La privatisation de Sonatel n’était donc point une cession d’un bijou national mais une ouverture de son capital où l’Etat et France Télécom avait le même poids. Seulement quelques années après, l’Etat, sous le poids de la dette, céda 9 % de sa part à France Télécom, permettant ainsi à France Télécom d’être à 42 % du capital et l’Etat du Sénégal de régresser jusqu’à 27 %. Malgré tout cela, France Télécom n’est pas majoritaire dans le capital de Sonatel et son statut reste celui d’un partenaire qui doit nous accompagner pour notre croissance externe. Dans un premier temps, elle nous a accompagnés au Mali, en Guinée Conakry et en Guinée Bissau. Mais, se rendant compte des opportunités du marché africain où elle devait accompagner Sonatel pour sa croissance externe, France Télécom finit par se comporter en concurrent. C’est ainsi qu’elle bloque, sans scrupule, tout projet d’acquisition de filiale par Sonatel. La dernière preuve est le Sos lancé par le Directeur général de Sonatel, Alioune Ndiaye, au président de la République pour qu’il lui vienne en soutien face au blocage de France Télécom pour l’acquisition d’une filiale en Sierra-Léone à l’occasion de l’inauguration du nouveau siège de Sonatel.

De précurseur, Sonatel est devenue soumise à la volonté de France Télécom qui contrôle son comité d’investissement dans ses propres terres, le Sénégal. Et cela est facilité par le fait que l’Etat a déserté son rôle d’arbitre et qu’il semble oublier qu’il est garant du pacte d’actionnariat qui lie France Télécom à l’Etat du Sénégal. Ces projets, même si France Télécom promet à l’Etat qu’il y aura un Gnoc au Sénégal. Elle ne lui signifie pas qu’elle en détiendra le contrôle à travers ses filiales où elle est l’actionnaire majoritaire ou carrément le propriétaire par la répartition du capital. Cela signifierait, en un mot, que le Sénégal cédera son réseau à une multinationale étrangère pour qui nous ne maîtrisons pas ce qu’elle fera de nos données personnelles. Cela veut dire que nous offrons notre connectivité à une multinationale étrangère à l’heure où le numérique sera la marque du développement d’un pays.

Comment en est-on arrivé là ?

Au vu de ce que je viens dire, on est arrivé là par une volonté impérialiste de France Télécom, par la complicité surprenante de notre Direction générale et enfin par une passivité alarmante de l’Etat du Sénégal

Quels sont véritablement les enjeux ou défis qui se posent aujourd’hui à Sonatel ?

Les enjeux de Sonatel sont aujourd’hui le développement du Sénégal. Car demain, le réseau, au-delà d’être le tuyau du « appeler et recevoir », il sera l’outil pour se soigner, pour étudier, pour entretenir sa maison, pour surveiller sa maison, pour se divertir et s’enrichir. Le réseau permettra de simplifier le parcours du citoyen pour payer ses impôts, pour envoyer et recevoir de l’argent, pour avoir son document administratif, pour payer sa facture, pour la compétitivité du monde des affaires du Sénégal.

Vous vous rendez compte qu’il y a de ces éléments qui se conjuguent déjà au présent. Nos défis sont :

- de conserver et d’améliorer notre réseau, pour notre souveraineté, pour notre indépendance, pour le développement du Sénégal numérique.
- de ramener l’équilibre initial où France Télécom et l’Etat du Sénégal avait chacun 33 % du capital de Sonatel.
- d’avoir le soutien de l’Etat pour acquérir d’autres filiales en Afrique
- de marquer d’une encre indélébile « Sonatel est sénégalaise et restera sénégalaise ».

La Direction évoque « des retombées intéressantes »

Suite à la grève de 48 heures décrété par l’intersyndicale des travailleurs de la Sonatel, la Direction générale de Sonatel rassure ses clients, soulignant que toutes les dispositions pour limiter les éventuels désagréments sont prises. Elle soutient que les projets de mutualisation des équipements de supervision répondent à une tendance lourde du secteur des télécommunications en Afrique et des retombées intéressantes pour le Sénégal et pour le groupe Sonatel.

« Malgré l’ouverture de la Direction générale, les partenaires sociaux ont décidé d’une rupture unilatérale du dialogue, en déclenchant une grève d’une durée de 48 heures à compter de ce jeudi 18 février 2016. Sonatel assure à ses clients qu’elle a pris toutes les dispositions pour limiter les désagréments éventuels qu’ils pourraient subir », indique un communiqué de la Direction de la communication institutionnelle et des relations extérieures. La même source explique que les projets de mutualisation des équipements de supervision répondent à une tendance lourde du secteur des télécommunications en Afrique, qui voit la plupart des opérateurs mutualiser la supervision de leur réseau. Selon la Direction de la communication institutionnelle et des relations extérieures, ce projet comporte des retombées intéressantes pour le Sénégal et pour le groupe Sonatel. Elle avance de nouvelles opportunités de créations d’emplois au Sénégal ; un meilleur suivi du rythme de l’évolution des technologies par une montée en compétence rapide dans la maîtrise des outils et process des grands équipementiers ; le renforcement de la compétitivité du groupe Sonatel ; le renforcement du leadership de Sonatel dans la sous-région en gardant son rang d’opérateur innovant et first mover ; de recentrage sur le service client à travers la mise en œuvre d’actions pour limiter les désagréments clients.

La direction s’est voulue plus rassurante, soulignant que Sonatel ne cédera aucune infrastructure dans la mise en œuvre de ce projet.

« Aussi, pour garantir un succès à ce projet, il a été nécessaire d’œuvrer en vue de la conformité avec la législation et la réglementation en vigueur ; l’adhésion des partenaires sociaux ; la préservation des acquis des salariés en leur assurant la stabilité de leur emploi et de leurs revenus », explique-t-on dans le texte. « Des mesures complémentaires ont ainsi été prises avec l’acceptation du partenaire Huawei qui nous accompagne dans le cadre du BOT pour une meilleure maîtrise des outils et process », indique le communiqué, soulignant que sur un effectif de 1.800, 34 salariés sont dans le périmètre de la supervision et sont éligibles. Selon la direction, la mobilité se fait sur la base du volontariat et à ce jour, 12 des 34 salariés concernés ont déjà choisi de rejoindre le partenaire Huawei. « Ces salariés ont la possibilité de réintégrer Sonatel au terme du BOT. Une proposition de 2 postes est faite à ceux qui optent de ne pas aller chez le partenaire (22 agents à ce jour », assure-t-on. De plus, la direction assure la garantie de maintien de tous les avantages actuels (rémunération, fonction, ancienneté, prêts, véhicule de fonction, avantages sociaux, dispositif médical et de santé, etc.). « Aucun plan social n’a été envisagé dans la mise en œuvre de ce projet », lit-on dans le texte.

Propos recueillis par Mamadou Guèye

(Source : Le Soleil, 19 février 2016)

Post-Scriptum

La Direction évoque « des retombées intéressantes »

Suite à la grève de 48 heures décrété par l’intersyndicale des travailleurs de la Sonatel, la Direction générale de Sonatel rassure ses clients, soulignant que toutes les dispositions pour limiter les éventuels désagréments sont prises. Elle soutient que les projets de mutualisation des équipements de supervision répondent à une tendance lourde du secteur des télécommunications en Afrique et des retombées intéressantes pour le Sénégal et pour le groupe Sonatel.

« Malgré l’ouverture de la Direction générale, les partenaires sociaux ont décidé d’une rupture unilatérale du dialogue, en déclenchant une grève d’une durée de 48 heures à compter de ce jeudi 18 février 2016. Sonatel assure à ses clients qu’elle a pris toutes les dispositions pour limiter les désagréments éventuels qu’ils pourraient subir », indique un communiqué de la Direction de la communication institutionnelle et des relations extérieures. La même source explique que les projets de mutualisation des équipements de supervision répondent à une tendance lourde du secteur des télécommunications en Afrique, qui voit la plupart des opérateurs mutualiser la supervision de leur réseau. Selon la Direction de la communication institutionnelle et des relations extérieures, ce projet comporte des retombées intéressantes pour le Sénégal et pour le groupe Sonatel. Elle avance de nouvelles opportunités de créations d’emplois au Sénégal ; un meilleur suivi du rythme de l’évolution des technologies par une montée en compétence rapide dans la maîtrise des outils et process des grands équipementiers ; le renforcement de la compétitivité du groupe Sonatel ; le renforcement du leadership de Sonatel dans la sous-région en gardant son rang d’opérateur innovant et first mover ; de recentrage sur le service client à travers la mise en œuvre d’actions pour limiter les désagréments clients.

La direction s’est voulue plus rassurante, soulignant que Sonatel ne cédera aucune infrastructure dans la mise en œuvre de ce projet.

« Aussi, pour garantir un succès à ce projet, il a été nécessaire d’œuvrer en vue de la conformité avec la législation et la réglementation en vigueur ; l’adhésion des partenaires sociaux ; la préservation des acquis des salariés en leur assurant la stabilité de leur emploi et de leurs revenus », explique-t-on dans le texte. « Des mesures complémentaires ont ainsi été prises avec l’acceptation du partenaire Huawei qui nous accompagne dans le cadre du BOT pour une meilleure maîtrise des outils et process », indique le communiqué, soulignant que sur un effectif de 1.800, 34 salariés sont dans le périmètre de la supervision et sont éligibles. Selon la direction, la mobilité se fait sur la base du volontariat et à ce jour, 12 des 34 salariés concernés ont déjà choisi de rejoindre le partenaire Huawei. « Ces salariés ont la possibilité de réintégrer Sonatel au terme du BOT. Une proposition de 2 postes est faite à ceux qui optent de ne pas aller chez le partenaire (22 agents à ce jour », assure-t-on. De plus, la direction assure la garantie de maintien de tous les avantages actuels (rémunération, fonction, ancienneté, prêts, véhicule de fonction, avantages sociaux, dispositif médical et de santé, etc.). « Aucun plan social n’a été envisagé dans la mise en œuvre de ce projet », lit-on dans le texte.

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