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Global Voice au Sénégal : Magouilles au bout du fil : un deal à milliards sur fond d’escroquerie

samedi 17 juillet 2010

Fracassante, l’entrée en scène de la société du groupe Global Voice, dans l’arène des télécommunications au Sénégal. Des opérateurs dénoncent, sous cape, des manœuvres tendant à affaiblir les sociétés de téléphonie au Sénégal, au profit de l’entreprise américaine, établie à Miami, qui gagne à tous les coups. Global Voice va récupérer au moins six fois plus que les sommes qu’elle va injecter dans le circuit. Une vraie aubaine pour hommes d’affaires américains et Sénégalais. Au pays de la Téranga, c’est la moindre des « galanterie ».

Depuis un an au moins, des allées et venues ont été enregistrées entre les couloirs de la Présidence et des réseaux d’affaires américains intéressés à voir Global Voice réussir son entrée en scène dans la turbulente mais très juteuse zone des télécommunications au Sénégal. Et lorsque le Président Wade signe le 28 mai dernier le décret n° 2010-632, instituant un système de contrôle et de la tarification des communications téléphoniques internationales entrantes, les carottes sont déjà cuites. Première curiosité, alors que c’est le ministre des Télécommunications qui est censé proposer le texte du décret, cette fois, c’est l’Agence de régulation des postes et télécommunications (Artp), dernièrement épinglée dans plusieurs magouilles, qui introduit la proposition de décret. Le texte est signé par Me Wade, travaillé qu’il a été par des lobbies très puissants. Tous les acteurs ne sont pas encore connus. Un nom émerge cependant du lot, Ramatoulaye Diagne Sall Sao, qui dirige également le cabinet Architectonic, bien connue au Palais. On cite aussi les noms d’autres visiteurs du soir qui ont réussi à convaincre le Président que le Sénégal allait gagner de l’argent dans cette opération. Des commissions ont-elles été versées à des niveaux différents du maillon de cette chaîne ? Aucun de nos interlocuteurs ne veut s’avancer de façon claire, insinuant du reste que l’opération est assez louche pour autoriser certaines conjectures. Le conseiller spécial du Président Wade, Thierno Ousmane Sy, lui-même joint au téléphone pour les besoins de certains recoupements, préfère s’emmurer dans un silence suspect, nous demandant de nous rapprocher du Directeur général de l’Artp, alors que rien ne se fait au Palais dans ce secteur, sans son aval. Quel est son degré d’implication dans cette affaire ? Le lever du jour n’est pas si loin. En tout état de cause, beaucoup d’acteurs du secteur des télécommunications concèdent que la « femme », Global Voice en l’occurrence, n’est pas aussi belle qu’on la présente.

« Juris-prudence » de l’échec

Cette boîte dirigée par Laurent Lamothe et qui a son siège à Miami s’est déjà cassée les dents en Guinée où elle a réussi la sacrée « prouesse » de faire baisser de 40% le volume de croissance de la célèbre société Mtn qui opère dans ce pays. Orange qui avait une progression de 25% en moyenne a vu son élan cassé, son avancée stoppée et, elle craint de voir ses chiffres connaître une baisse vertigineuse dans les prochaines années. La Côte d’Ivoire n’a pas attendu que les carottes soient cuites pour casser le contrat. En Côte d’Ivoire, le Président Gbagbo, sensibilisé sur les risques de voir des pans entiers du secteur des télécommunications tomber en faillite, a préféré abroger le décret qu’il avait pris pour autoriser à Global Voice d’opérer. Le Ghana, nous signalent des sources bien avisées, serait sur le point de suivre les traces de la Côte d’Ivoire. Pourquoi donc un pays comme le Sénégal, se paie de « galanterie » d’accueillir sur ses terres une société qui a administré presque partout les preuves de son incompétence ? C’est là un des mystères de cette opération bien nébuleuse.

Le jackpot de Global Voice

Mais Global Voice peut déjà se frotter les mains. Elle n’aura à investir que 5 millions de dollars (environ 2 milliards Cfa) pour acheter les équipements nécessaires, pour récupérer chaque année, 30 millions de dollars (12 milliards environ), selon les projections les plus pessimistes. Une vraie aubaine, pour un travail qui aurait pu être fait par l’Agence de régulation des postes et télécommunications (Artp) dont c’est la mission régalienne. « C’est comme si on demandait à la police de ne plus travailler, on recrute des mercenaires pour assurer la sécurité et après on se partage les bénéfices », nous souffle une source bien introduite dans le secteur des télécommunications. C’est pourquoi Mamadou Aïdara Diop, responsable de l’intersyndicale de la Sonatel, a pu dire que « ce n’est ni plus ni moins qu’un projet qui vise à gagner énormément d’argent sur le dos des Sénégalais au profit de Global voice et de l’Artp (Agence de régulation des télécommunications et des postes). Avec ce système, c’est l’Artp qui va désormais facturer et recouvrer. Les bénéfices ne seront pas reversés au Trésor public. Nous n’aurons plus de regard sur les bénéfices de la société. Tous les bénéfices iront dans les poches de l’Artp et Global voice. Ce sera un partage occulte des ressources de l’entreprise par les deux parties ». Et c’est le consommateur qui trinque.

Dans cette affaire, des garanties sont données par les services de l’Artp sur la hausse éventuelle des tarifs de communications de la Diaspora. Seulement, les travailleurs de la Sonatel ont opposé un démenti à cet argument de l’Etat. « La diaspora appelle avec les cartes prépayées et non pas aux tarifs Premium d’environ 1,4 euro par minute qu’affichent les opérateurs du Nord. Or, ce postulat, qui fait dire aux initiateurs de ce projet au Sénégal qu’ils vont assurer des revenus complémentaires à l’Etat qui devraient lui permettre de se passer des fonds du Mca, est faux. Bien au contraire, l’Etat crée une situation d’augmentation généralisée des prix à partir du moment où il fait passer à 141 francs par minute au Sénégal, et en ôtant aux opérateurs leur faculté de négocier et de fixer eux-mêmes les prix de terminaison sur les réseaux. Conséquence attendue, des fraudes à la pelle dans le système et un affaissement du nombre de minutes d’appels, avec des conséquences immédiates pour le Trésor public.

Fondement juridique et indemnisation

D’ailleurs, cette privation imposée aux opérateurs pose le problème juridique du décret signé par le président de la République. En enlevant à la Sonatel la prérogative de fixer elle-même son tarif pour les communications internationales, en lui fixant, d’autorité, un seuil minimal à 141,03 francs, le décret 2010-632 a violé sa Convention de concession et son cahier de charges tels que définis dans le décret 97-715 du 19 juillet 1997, portant approbation de la Convention de concession et du cahier de charges de la Sonatel.

L’on rappelle que l’article 3.4.1.2, relatif aux services internationaux, dispose : « Compte tenu de la nécessité de s’adapter à la concurrence mondiale sur les services internationaux, la Sonatel a délégation permanente pour fixer les tarifs de ces services. »

La violation de cette Convention ou sa modification unilatérale exposerait l’Etat au paiement d’une indemnisation, comme il est bien mentionné à l’article 3.2 de la Convention. « Le Concédant peut exceptionnellement modifier unilatéralement les termes de la Convention et de son cahier de charges pour des motifs d’intérêt général, sous réserve d’une juste indemnisation du concessionnaire. Cette indemnisation sera déterminée par un expert indépendant sélectionné d’accord parties. »

Bonjour les écoutes téléphoniques

Le décret n° 2010-632 du 28 mai 2010, instituant un système de contrôle et de la tarification des communications téléphoniques internationales entrantes, dépasse le cadre purement économique. Il se pose des questions liées à la sécurité intérieure et à la liberté des usagers. En effet, la confidentialité des conversations venant de l’extérieur pourrait souffrir de l’ingérence de Global Voice Group dans la gestion des communications internationales entrantes. Il ressort des investigations que nous avons menées que la « violation du secret de la correspondance serait établie ». Car, « en prenant connaissance des détails des communications internationales sous le prétexte du contrôle du volume de trafic, on prend connaissance de qui, à l’étranger, a appelé qui dans le pays ». Avec une précision sur la date, l’heure et la durée de la communication. Mieux, on pénètre même dans le cerveau même des systèmes des sociétés de téléphonie. « On dispose de toutes les informations imaginables. Cela favorise non seulement l’espionnage économique mais aussi une société comme Global Voice qui opère en Gambie, peut parfaitement livrer certaines informations à Yaya Jammeh par exemple sur le contenu de conversations sensibles ». Rien que ces possibilités constituent une violation de la Constitution du Sénégal qui garantit que le secret de la correspondance, des communications postales, télégraphiques, téléphoniques et électroniques est inviolable. « Il ne peut être ordonné de restriction à cette inviolabilité qu’en application de la loi », précise la Constitution.

Cette violation du secret de la correspondance, défendue par la Loi fondamentale, serait plus manifeste avec l’arrivée du partenaire technique étranger, Global Voice, en ce qu’il prend connaissance de ces détails des communications. D’ailleurs, l’Artp, en application du décret 2010-632, demande, dans sa correspondance n°1780/Artp/Dg du 17 juin 2010, à ce que « chaque semaine, les détails des communications internationales (lui) soient transmis ». Ce qui constitue une violation de la Constitution et de la loi portant Code des télécommunications. « Cette atteinte aux libertés et aux lois en matière de justice ternit même l’image de marque du Sénégal tant auprès des institutions internationales (Fmi, Banque mondiale) qu’auprès de l’opinion publique mondiale », se désolent des cadres en service dans les télécoms.

Les vraies raisons de la chute de Goumalo Seck

La presse a beaucoup écrit sur les raisons du limogeage et de la descente aux enfers de Daniel Goumalo Seck, ancien Directeur général de l’Agence de régulation des postes et télécommunications (Artp). Mais selon des informations bien recoupées, cette affaire de Global Voice ne serait pas sans lien avec ses problèmes. Daniel Goumalo Seck a-t-il refusé de suivre les instructions du palais dans ce dossier ? Nos sources répondent par l’affirmative. En tout état de cause, l’actuel directeur général de l’Artp n’a manifesté aucun état d’âme pour faire parvenir au palais le document technique sur lequel le Président Wade a apposé sa signature. Ce, en contournant le ministère de tutelle.

Ndiaga Ndiaye & M. Wane

(Source : L’Observateur, 17 juillet 2010)

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