Une campagne publicitaire mystérieuse envahissait depuis quelques jours les avenues de Dakar. Des affiches blanches portant le slogan rouge « LiMooy cool » ou « LiMooy stylé » (« ça c’est cool » ou « ça c’est stylé », en wolof). Le secret a été levé mardi 1er octobre, avec l’annonce de la transformation de Tigo, deuxième opérateur téléphonique au Sénégal avec 25 % de part de marché, en Free Sénégal. Les nombreuses affiches dans la ville arborent désormais le logo du groupe français.
Ce lancement de la marque Free était pressenti depuis le rachat, en 2018, de Tigo Sénégal, propriété de l’entreprise luxembourgeoise de télécommunications Millicom, par Saga Africa Holdings, un consortium regroupant Xavier Niel (actionnaire à titre personnel du Monde), le Sénégalais multimillionnaire Yérim Habib Sow et le puissant homme d’affaires malgache Hassanein Hiridjee.
« Pendant dix-huit mois, on a mené un plan d’investissement de 150 millions de dollars [136,5 millions d’euros] : on a étendu notre réseau, déployé de la fibre optique, commencé à baisser nos prix. On a pu construire un réseau 4G +, explique Mamadou Mbengue, directeur général de Free Sénégal. Après tout cela, il fallait arriver avec une marque forte. On voulait casser les codes et Free est une marque de rupture. » Le Sénégal devient ainsi le premier pays étranger où est utilisée la bannière Free.
Tirer les prix vers le bas
Intervenue à l’occasion des 20 ans de la marque, la mutation de Tigo en Free s’est faite avec la volonté de tirer les prix du marché mobile vers le bas. Quatre offres agressives ont été présentées, dont un premier forfait à 1 000 francs CFA par mois (1,52 euro), comprenant trente minutes d’appel, 2 gigaoctets de données et l’utilisation illimitée de WhatsApp. Ce service de messagerie, très utilisé au Sénégal, agace souvent les opérateurs téléphoniques du continent, car elle permet de passer des appels sans dépenser de crédit téléphonique.
Par ce positionnement offensif sur le marché, Free vise son concurrent Orange, premier opérateur du pays avec le groupe Sonatel et ses 53 % de part de marché. Afin de s’imposer, Free a déployé son réseau 4G + dans Dakar et les grandes villes sénégalaises, qu’il promet « trois fois plus rapide que la moyenne actuelle du marché ». « Jusqu’à présent, au Sénégal, il y avait trop d’offres tarifaires et les prix étaient trop élevés. La data était même plus chère qu’en France. On vient simplifier tout ça. Bref, on fait du Free », déclare Hassanein Hiridjee, ce milliardaire malgache très lié à M. Niel, actif dans les télécoms, les hydrocarbures, l’immobilier et les services financiers.
Au Sénégal, où de nombreux habitants possèdent deux, voire trois, téléphones avec des opérateurs différents, afin de bénéficier des offres exclusives de chacun, le taux de pénétration du mobile atteignait 106 %, en 2018, selon l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes. En quelques années, le mobile a envahi le pays, passant de 7,5 millions d’abonnés en 2010 à plus de 15 millions aujourd’hui. Avec 97 % des connexions Internet provenant de téléphones portables, c’est aussi l’appareil privilégié pour naviguer sur le Web, bien devant la tablette ou l’ordinateur.
Compte bancaire simplifié
Free cherche aussi à concurrencer Orange sur l’une de ses chasses gardées, le mobile money, en lançant un service de transactions financières par mobile nommé Free Money, en opposition à Orange Money. Ce service, très utilisé par les Sénégalais, permet de transférer de l’argent, payer ses factures d’eau, d’électricité, d’Internet, et régler ses achats dans les commerces et les restaurants. Il sert surtout de compte bancaire simplifié et de carte de crédit pour une population dont le taux de bancarisation s’élevait à 19 % en 2018, selon la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest.
L’aventure de Free sur le continent ne s’arrêtera sans doute pas aux frontières du Sénégal. Dans l’océan Indien, M. Niel s’est déjà associé à M. Hiridjee pour conquérir les Comores et Mayotte, et les deux magnats se sont lancés ensemble à la Réunion. « Il y a en ce moment une recomposition du paysage des télécoms en Afrique et plein d’opportunités à saisir, à l’ouest comme à l’est », souligne M. Hiridjee.
Matteo Maillard et Marie de Vergès
(Source : Le Monde, 3 octobre 2019)
Bande passante internationale : 172 Gbps
4 FAI (Orange, Arc Télécom, Waw Télécom et Africa Access)
19 266 179 abonnés Internet
Liaisons louées : 3971
Taux de pénétration des services Internet : 106,84%
3 opérateurs : Sonatel, Expresso et Saga Africa Holdings Limited
382 721 abonnés
336 817 résidentiels (88,01%)
45 904 professionnels (11,99%)
Taux de pénétration : 1,67%
3 opérateurs (Orange, Free et Expresso)
21 889 688 abonnés
Taux de pénétration : 123,34%
3 050 000 utilisateurs
Taux de pénétration : 17,4%
Facebook : 2 600 000
Facebook Messenger : 675 200
Instagram : 931 500
LinkedIn : 930 000
Twitter : 300 000