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En Afrique, les coupures très politiques des réseaux sociaux et Internet

dimanche 11 août 2019

En Algérie, début août, l’accès à YouTube et Google a été bloqué après la diffusion d’une vidéo critique sur l’armée. D’autres pays du continent, aussi secoués par des mouvements de contestation, ont recours à cette pratique. Des ONG s’en alarment.

En Afrique, pour réduire au silence les voix dissonantes ou limiter la prolifération de contenus embarrassants sur la Toile, certains gouvernements n’hésitent plus à bloquer l’accès aux réseaux sociaux. Un recours de plus en plus récurrent qui inquiète les associations de défense des droits de l’Homme.

Jeudi 8 août, en Algérie, les autorités ont bloqué l’accès à Youtube et à Google. C’est l’organisation Netblocks qui a donné l’alerte sur son site internet et sur Twitter. “YouTube et plusieurs services de Google ont été bloqués jeudi au soir en Algérie par la société publique Algeria Telecom et d’autres grands fournisseurs d’accès Internet” a affirmé l’associaton de défense des droits numériques dans le monde.

La restriction qui a affecté les services Google Translate, Google Hangouts ou même Play Store a duré plusieurs heures avant d’être levée aux alentours de 23 heures. “Cela correspond à des méthodes utilisées pour restreindre les contenus en ligne dans le pays” a dénoncé Netblocks. D’autant plus que le blocus intervient après la publication d’une vidéo de l’ex-ministre algérien de la Défense Khaled Nezzar.

Dans une vidéo d’une dizaine de minutes qui a fait plus de de 40 000 vues sur YouTube, l’ancien chef d’état-major appelle les autorités militaires de l’Algérie, secouée depuis plusieurs mois par des manifestations après la chute d’Abdelaziz Bouteflika, “à répondre aux demandes du peuple.” “Le dialogue entre civils et militaires doit être continu. Il est regrettable que l’on muselle les personnes qui dénoncent des anomalies et des excès’’ a-t-il affirmé.

Couper Internet, pratique récurrente

“Rien ne prouve pour le moment qu’il y a un lien entre le blocage d’Internet et le discours du général Khaled Nezzar” estime Khaled Drareni, directeur éditorial du site d’informations en ligne Casbah Tribune contacté par France 24. “Mais ce qui est certain, c’est que jeudi l’accès à YouTube et à Google a été restreint. Cela n’a évidemment pas empêché les internautes de voir la vidéo en question ”.

Khaled Nezzar, général à la retraite de 81 ans, qui fait par ailleurs l’objet d’un mandat d’arrêt international émis par le tribunal militaire, n’a pas manqué de lancer des piques à peine voilées à l’actuel chef d’état-major, Ahmed Gaïd Salah, homme fort de fait du pays. “Alors que les civils devraient normalement prendre les grandes décisions liées à la guerre et à la paix et que le militaire exécute, comment admettre la situation ubuesque dans la quelle nous nous trouvons. Un vice-ministre [Ahmed Gaïd Salah] qui passe outre le chef d’état par intérim. C’est le monde à l’envers.”

Khaled Nezzar et Ahmed Gaïd Salah ont des différends depuis plusieurs années. Le premier reproche au second sa grande emprise sur l’armée. “Mais Les tensions entre les deux hommes se sont exacerbées ces dernières semaines avec les tweets incendiaires de Khaled Nezzar”’ explique le journaliste Khaled Drareni.

Ce n’est pas la première fois qu’Internet est coupé en Algérie. Dans ce pays de 43 millions d’habitants, Internet est souvent coupé en juin lors des examens du baccalauréat. Officiellement pour lutter contre la triche. En février, tout au début de la protestation contre un cinquième mandat d’Abdelaziz Bouteflika, l’accès aux réseaux sociaux avait aussi été pertubé.

Soudan, RD Congo, Cameroun : Internet sous contrôle

Ces dernières années le recours à cette pratique est d’ailleurs devenu récurrente pour étouffer les mouvements de contestation. “Couper Internet est une violation des droits de l’Homme et une atteinte aux libertés. Malheureusement, cela est resté très longtemps impuni par la communauté internationale. Il est donc difficile aujourd’hui d’inverser la tendance” explique Julie Owono, directrice exécutive de Internet sans Frontières, contactée par France 24.

Au Soudan, les manifestants qui réclament une transition du pouvoir dirigée par les civils depuis la chute de Omar el-Bechir ont été privés d’internet le 3 juin. Ce même jour, 127 personnes avaient péri dans la répression sanglante d’un sit-in par l’armée, selon un comité de médecins proche du mouvement.

En janvier 2018, lors du dépouillement des résultats de la présidentielle tendue en RD Congo, les autorités avaient aussi décidé de couper l’accès Internet pour éviter “un soulèvement populaire” selon les termes de Barnabe Kikaya Bin Karubi, conseiller diplomatique de l’ancien président Joseph Kabila. “ Il y a des gens qui intoxiquaient la population avec de faux chiffres concernant les élections”, avait-il affirmé. “Le Conseil national de sécurité a décidé qu’il était impératif de couper Internet pour permettre à la Commission électorale nationale indépendante (Céni) de terminer la compilation et l’encodage des résultats des élections”, justifiait-il.

>> À voir aussi : Le conflit séparatiste au Cameroun devient crise agricole et économique

Tout au long de l’année 2017 au Cameroun, Internet a été régulièrement coupé et l’accès aux réseaux sociaux limité dans les zones anglophones du Nord et du Sud-Ouest où sévit un conflit séparatiste depuis novembre 2016. Ces coupures intempestives avaient pousser des ONG à porter plainte contre l’État camerounais auprès du Conseil consitutionnel.

Phénomène inquiétant

Julie Owono reste catégorique. Selon elle, ‘‘restreindre l’accès aux réseaux sociaux ou à Internet n’a jamais permis d’arrêter la désinformation ou le discours de haine. Cela n’a jamais marché. D’autres moyens existent. Il faut responsabiliser les plateformes qui ne doivent pas monétiser la haine. Les gouvernants doivent prendre des mesures pour encourager la modération des contenus sur les réseaux sociaux et non censurer systématiquement’’.

Si la propension à limiter l’accès à Internet a jusque-là été l’apanage des régimes autoritaires, la pratique séduit certains pays qui ont pourtant une forte tradition démocratique comme le Bénin. En avril 2019, les autorités ont pertubé pour la première fois l’accès à internet lors des élections législatives auxquelles n’a pas participé l’opposition et qui se sont soldées par une crise politique sans précédent. “C’est très inquiétant pour ces pays qui n’avaient jamais eu des problèmes relatifs aux libertés. C’est assez préoccupant. Couper Internet, c’est le premier signe qu’une élection ne se passe pas bien’’ conclut Julie Owono.

(Source : France24, 11 août 2019)

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(Datareportal, Janvier 2023)

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