OSIRIS

Observatoire sur les systèmes d’information, les réseaux et les inforoutes au Sénégal

Show navigation Hide navigation
  • OSIRIS
    • Objectifs
    • Partenaires
  • Ressources
    • Société de l’Information
    • Politique nationale
    • Législation et réglementation
    • Etudes et recherches
    • Points de vue
  • Articles de presse
  • Chiffres clés
    • Le Sénégal numérique
    • Principaux tarifs
    • Principaux indicateurs
  • Opportunités
    • Projets

Accueil > Articles de presse > Archives 1999-2024 > Année 2015 > Septembre 2015 > Cyberespace : une-zone de non-droit ? Un lieu de médisance impunie

Cyberespace : une-zone de non-droit ? Un lieu de médisance impunie

mardi 22 septembre 2015

Point de vue

C’est le philosophe Sénèque qui écrivait dans son ouvrage intitulé La brièveté de la vie que « Bien des grands hommes se sont affranchis de tout soin, ont renoncé aux richesses, aux emplois, aux plaisirs, pour ne s’occuper, jusqu’au terme de leur carrière, que de savoir vivre. Cependant presque tous ont avoué, en quittant la vie, qu’ils n’avaient pu acquérir cette science : comment à plus forte raison les hommes dont nous parlons l’auraient-ils apprise ? ». Il y a une semaine, une connaissance résidant hors du pays, m’a appelé pour me demander si j’avais lu un texte, pour dire le moins, peu courtois à mon égard qui avait été publié par un internaute, je répondais que non. J’ajoutais à l’attention de mon interlocuteur : « j’étais très peu connecté pour lire les choses publiées sur les sites internet et que ce n’était point une attitude de rejet de ma part. Il s’agissait plutôt d’un renoncement, car, après plusieurs expériences, j’avais finalement décidé de me passer des sites d’information et en particulier des pages commentaires accompagnant les publications, car les opinions publiées m’apportaient très peu de choses. En plus, certaines d’entre elles heurtaient violemment l’idée que je me faisais de la morale ».

J’avais à peine fini de lui répondre qu’il crût devoir m’imposer la lecture du texte qu’il avait sous les yeux. Je l’ai poliment écouté, avant de lui demander la permission de raccrocher. Je n’ai eu aucun commentaire pour lui. Quand je raccrochais, j’ai eu le temps de l’entendre lâcher quelques mots : « les gens sont méchants et peu sérieux... ».
Peut-être bien oui. Et lui qui rapporte des propos injurieux, alors ? Je crois que le philosophe Sénèque s’adresse à des personnes du même acabit que mon interlocuteur. Un proverbe Ouolof enseigne que « ce n’est pas celui qui dit qui parle, mais plutôt celui qui rapporte ». Disposer d’un savoir vivre est une chose qui n’est pas toujours évidente.
Je signale que c’était la deuxième fois que mon interlocuteur et moi échangions des paroles. La première fois, c’était quand nous avons été présentés par un ami commun dans une maison mortuaire et avions échangé nos coordonnées. Une personne, respectable a priori, très avenant au moment où nous faisions connaissance.

En réalité, le débat que je pose dépasse largement les péripéties de cette anecdote. On adresse, ici, la question fondamentale de l’administration des sites d’information ayant pignon sur rue au Sénégal. Les internautes qui insultent et diffament sur Internet considèrent que cet espace est une zone de non droit. Comme le dit le juge Pape Assane Touré (Secrétaire général adjoint du Gouvernement) dans son ouvrage intitulé Le traitement de la Cybercriminalité devant le juge : « A l’image de l’espace terrestre, maritime ou aérien, il n’est pas une zone de non droit et ne saurait être rebelle à toute activité régulatrice de ses contenus ».

La régulation est une nécessité, voire un impératif de la part de l’Etat, face à des délinquants qui s’autorisent les dérives les plus graves. Cette question dépasse largement la seule problématique des publications injurieuses et diffamatoires. Ainsi, comme le souligne le juge Touré, dans son ouvrage précité, le Sénégal se doit de mettre en place un dispositif répressif adapté à la lutte contre la criminalité des réseaux devant l’autorité judicaire.

Ceci permettrait de répondre à un double enjeu : inscrire notre législation, d’une part, dans le cadre de l’appel émis par le Sommet mondial sur la société de l’information tenu en deux phases à Genève en décembre 2002 et en novembre 2005 à Tunis. Et d’autre part, proposer, dans un contexte de mutation de l’ordre pénal, une stratégie innovante de politique criminelle contre la criminalité numérique devant le juge sénégalais.
Une occasion unique pour le génie africain d’inventer des réponses pénales adaptées à la cybercriminalité en dépassant le mimétisme classique. On réussirait ainsi « l’édification d’une société africaine de l’information et des connaissances. Une société suffisamment sécurisée et ancrée dans les valeurs positives de l’Afrique ». Reprenant l’auteur Cheikh Hamidou Kane, M. Touré rappelle que « la Civilisation n’est en réalité qu’une architecture de réponses ».

En vérité, le Sénégal a beaucoup avancé sur la question. Il a, en effet, légiféré sur beaucoup d’aspects de la cybercriminalité. La loi n° 2008-11 du 25 janvier 2008 portant sur la cybercriminalité a intégré les moyens de communication électronique dans les moyens de diffusion publique ; de sorte que les cyberdélits de presse sont incriminés au même titre que les délits de presse classiques. Il faut cependant regretter le fait que ce dispositif soit peu opérationnel.

La cyberdélinquance présente souvent au Sénégal, le visage d’une cybercriminalité de contenus (cybercontenus illicites, injures, diffamations, collecte déloyale de données à caractère personnel, atteintes à la e-réputation etc.).

Ces infractions impliquent souvent les éditeurs, l’hébergeur et le fournisseur d’accès et l’auteur à proprement parler de l’infraction sur qui il est difficile de mettre la main, en raison de l’anonymat qui sévit dans le cyberespace.

C’est pour cette raison que la loi n° 2008-08 du 25 janvier 2008 sur les transactions électroniques prévoit qu’en cas d’infraction constatée qu’une action puisse être engagée contre l’hébergeur ; ces prestataires sont tenus de retirer les contenus manifestement illicites, suite à une réquisition judiciaire, sous peine d’engager leur responsabilité pénale. Cette solution légale nous paraît illusoire.

Rares sont les fournisseurs d’hébergement qui sont établis au Sénégal. Pour engager de telles actions en France ou aux Etats-Unis où la plupart des sites sénégalais sont hébergés, il faudrait bien être lié à ces Etats par des accords d’entraide et mettre en œuvre les procédures lourdes, lentes et complexes d’entraide judiciaire internationale pour y arriver.

Sous ce rapport, l’éditeur de contenu, appelé fournisseur d’édition par la loi sur les transactions électroniques, est au cœur de l’effectivité de la lutte contre le cybercrime au Sénégal. Des actions spécifiques doivent pouvoir intentées contre les éditeurs ou les fournisseurs d’accès directement pour régler le problème de mise en œuvre des mécanismes de lutte contre la cybercriminalité.

C’est heureux que la Convention de Budapest adoptée sous l’égide du Conseil de l’Europe le 23 novembre 2001 se propose justement de simplifier et d’accélérer au maximum le processus de la coopération internationale requise dans la lutte contre la cybercriminalité transnationale. Ce traité international est le premier et le seul instrument juridique international de lutte contre la cybercriminalité.

Malheureusement, notre pays n’a pas encore adhéré à cette convention, le dossier d’adhésion étant encore pendant au Ministère des Affaires étrangères et des sénégalais de l’Extérieur. Cette Convention exige pourtant des Etats-Unis (pays membre de cette Convention), lieu d’établissement de presque la quasi-totalité des fournisseurs de service Internet (Google, Facebook, Youtube, Gmail, Yahoo etc.) une collaboration franche et une simplification notoire des procédures d’incrimination, pour une traque plus efficace des délinquants transnationaux qui considèrent que l’espace numérique est une zone de non droit.En effet, la Convention de Budapest a instauré un point de contact 24/7 qui offre l’occasion aux autorités judiciaires et policières de disposer d’un puissant outil d’échanges d’informations et de coopération en temps réel.

Les réformes en cours de mise en œuvre dans le Code pénal et le Code de procédure pénale prévoient de nouveaux mécanismes de répression qui vont encore davantage rendre plus efficace la lutte contre la cybercriminalité. Il en est ainsi notamment des réquisitions aux fins de retrait de contenus illicites même hébergés à l’étranger et du blocage judiciaire de contenus manifestement illicites, qui contribueront à limiter l’ampleur de la diffusion des contenus illicites en ligne.

Il faut en arriver à construire une architecture d’incriminations plus globale, prenant en compte le principe pénal de neutralité technologique et fédérant dans un texte global et unique l’essentiel des législations qui se présentent encore sous des formes très éparses. Le phénomène de la cybercriminalité exige une réponse juridique et pénale adaptée aux particularités des réseaux électroniques : un cyberdroit pénal. « Dans un contexte marqué par la globalisation des risques, des crimes et des menaces sur la cybersécurité, les Etats ont un réel besoin d’élaboration des stratégies appropriées de politique criminelle qui combinent les réponses étatiques et sociétales ». C’est ce qu’écrit le professeur Abdallah Cissé dans la préface de l’ouvrage de Papa Assane Touré. L’Etat organise de façon plus ou moins satisfaisante le cadre de répression. On ne peut en dire autant des réponses apportées par la société elle-même au phénomène. Dans de nombreux pays l’autorégulation joue un rôle important, alors que chez nous celle-ci est quasiment inexistante.

« Internet n’est pas un autre monde, c’est le nôtre. La nature même d’Internet appelle des régulations et des protections. Internet n’est pas une zone de non-droit, bien au contraire. Les lois s’y appliquent, qu’il s’agisse de protéger la liberté d’expression, les droits contractuels ou de combattre la cybercriminalité. Bien sûr, la dimension mondiale du réseau crée des problèmes juridiques nouveaux. Demain, les droits d’Internet seront garantis dans les constitutions ».

C’est ainsi que s’exprime un expert de la cybercriminalité. Pourtant, force est de reconnaître qu’au Sénégal, en l’état actuel des choses, Internet apparaît comme un défouloir, un lieu d’expression de la haine, une zone de droit ou l’insulte est totalement banalisée. Sous le couvert de l’anonymat parfois même à découvert, on calomnie, exprime une haine irrépressible à l’égard de personnes qui ne sont coupables d’aucun crime, d’aucune infamie. Leur sort c’est d’exister ou d’avoir exprimé une position qui ne plait pas. Ceux qui favorisent l’expression de cette haine ou diffusent ces insultes vont vaquer tranquillement à leurs occupations, sans jamais avoir été inquiétés par la justice. Jusqu’à quand cela durera dans notre pays ?

Abdou Latif Coulibaly

(Source : Le Soleil, 22 septembre 2015)

Fil d'actu

  • TIC ET AGRICULTURE AU BURKINA FASO Étude sur les pratiques et les usages Burkina NTIC (9 avril 2025)
  • Sortie de promotion DPP 2025 en Afrique de l’Ouest Burkina NTIC (12 mars 2025)
  • Nos étudiant-es DPP cuvée 2024 tous-tes diplomés-es de la Graduate Intitute de Genève Burkina NTIC (12 mars 2025)
  • Retour sur images Yam Pukri en 2023 Burkina NTIC (7 mai 2024)
  • Quelles différences entre un don et un cadeau ? Burkina NTIC (22 avril 2024)

Liens intéressants

  • NIC Sénégal
  • ISOC Sénégal
  • Autorité de régulation des télécommunications et des postes (ARTP)
  • Fonds de Développement du Service Universel des Télécommunications (FDSUT)
  • Commission de protection des données personnelles (CDP)
  • Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA)
  • Sénégal numérique (SENUM SA)

Navigation par mots clés

  • 2070/2245 Régulation des télécoms
  • 176/2245 Télécentres/Cybercentres
  • 1553/2245 Economie numérique
  • 801/2245 Politique nationale
  • 2245/2245 Fintech
  • 253/2245 Noms de domaine
  • 821/2245 Produits et services
  • 702/2245 Faits divers/Contentieux
  • 363/2245 Nouveau site web
  • 2162/2245 Infrastructures
  • 829/2245 TIC pour l’éducation
  • 90/2245 Recherche
  • 121/2245 Projet
  • 1396/2245 Cybersécurité/Cybercriminalité
  • 862/2245 Sonatel/Orange
  • 782/2245 Licences de télécommunications
  • 132/2245 Sudatel/Expresso
  • 477/2245 Régulation des médias
  • 602/2245 Applications
  • 495/2245 Mouvements sociaux
  • 769/2245 Données personnelles
  • 63/2245 Big Data/Données ouvertes
  • 297/2245 Mouvement consumériste
  • 180/2245 Médias
  • 323/2245 Appels internationaux entrants
  • 695/2245 Formation
  • 54/2245 Logiciel libre
  • 880/2245 Politiques africaines
  • 410/2245 Fiscalité
  • 83/2245 Art et culture
  • 285/2245 Genre
  • 709/2245 Point de vue
  • 485/2245 Commerce électronique
  • 718/2245 Manifestation
  • 157/2245 Presse en ligne
  • 62/2245 Piratage
  • 103/2245 Téléservices
  • 435/2245 Biométrie/Identité numérique
  • 154/2245 Environnement/Santé
  • 174/2245 Législation/Réglementation
  • 167/2245 Gouvernance
  • 914/2245 Portrait/Entretien
  • 72/2245 Radio
  • 392/2245 TIC pour la santé
  • 134/2245 Propriété intellectuelle
  • 29/2245 Langues/Localisation
  • 502/2245 Médias/Réseaux sociaux
  • 957/2245 Téléphonie
  • 96/2245 Désengagement de l’Etat
  • 489/2245 Internet
  • 57/2245 Collectivités locales
  • 188/2245 Dédouanement électronique
  • 508/2245 Usages et comportements
  • 515/2245 Télévision/Radio numérique terrestre
  • 277/2245 Audiovisuel
  • 1368/2245 Transformation digitale
  • 192/2245 Affaire Global Voice
  • 75/2245 Géomatique/Géolocalisation
  • 148/2245 Service universel
  • 331/2245 Sentel/Tigo
  • 90/2245 Vie politique
  • 762/2245 Distinction/Nomination
  • 17/2245 Handicapés
  • 337/2245 Enseignement à distance
  • 324/2245 Contenus numériques
  • 292/2245 Gestion de l’ARTP
  • 90/2245 Radios communautaires
  • 809/2245 Qualité de service
  • 213/2245 Privatisation/Libéralisation
  • 66/2245 SMSI
  • 227/2245 Fracture numérique/Solidarité numérique
  • 1286/2245 Innovation/Entreprenariat
  • 674/2245 Liberté d’expression/Censure de l’Internet
  • 23/2245 Internet des objets
  • 86/2245 Free Sénégal
  • 242/2245 Intelligence artificielle
  • 98/2245 Editorial
  • 9/2245 Yas

2025 OSIRIS
Plan du site - Archives (Batik)

Suivez-vous