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Burkina Faso : « Ils avaient les armes, et nous nous avions seulement Whatsapp »

lundi 12 octobre 2015

Les 16 et 17 septembre 2015, un putsch a plongé le Burkina Faso dans une situation de crise marquée, entre autres, par des affrontements entre une partie de l’armée et les foules de manifestants. L’occasion pour la jeunesse de ce pays, de réinventer un outil de collaboration et d’échanges d’informations : les réseaux sociaux.

« Le mouvement était parti dès les manifestations qui ont entraîné la chute du président Blaise Compaoré en octobre 2014 », explique Tahirou, le regard plongé dans son smartphone. Ce jeune étudiant, la vingtaine, a créé un groupe Whatsapp du nom de « La Patrie ou la mort ». Il compte depuis octobre 2014, un nombre croissant de membres (1230 membres en septembre), avec un objectif à peine voilé : donner un minimum d’organisation à la révolte au sein de la jeunesse.

De véritables conseils de crise…

« Quartier Ouaga 2000 bouclé, faites attention les gars passons par la zone 1 en cas de cas. » (sic). Le message a le sérieux et la précision d’une consigne militaire. C’est pourtant dans le fil de discussion d’un autre groupe Whatsapp « Les Sankaristes » (870 membres en septembre, ndlr) que l’on peut le trouver le matin du 29 septembre. La veille, l’état-major général avait annoncé la possibilité d’un affrontement entre l’armée régulière et les éléments du Régiment de Sécurité Présidentielle (désormais ex-RSP, ndlr). Ceux-ci avaient transformé leur garnison située au quartier Ouaga 2000 en une véritable forteresse. Quelques heures plus tard, les premiers tirs de lance-roquettes retentissaient.

À l’appui de la conscience politique et de l’engagement de la jeunesse burkinabé, ces groupes ont très tôt fédéré les informations sur les réseaux sociaux, dans un esprit de sérieux et d’utilité pratique. « Ils (les groupes Whatsapp, ndlr) fonctionnaient carrément comme des conseils de crise », confie Basidou Kinda, journaliste pour le quotidien L’Évènement. « On y trouvait non seulement des informations pratiques sur les déplacements des forces de l’ordre en temps réel, mais aussi des conseils sur la façon d’atténuer l’effet des gaz lacrymogènes, ou de contourner les barrières de sécurité ». Pour ce jeune journaliste, il n’y a pas de doute, les réseaux sociaux ont coordonné les manifestants au cours de la crise dans le pays et, ce, dès les protestations d’octobre 2014 qui ont entraîné la chute de l’ancien président Blaise Compaoré.

…et un vocabulaire de crise

La récente crise burkinabé à permis à la jeunesse de trouver une nouvelle utilité pratique aux outils qui sont en sa possession. « C’est simple, on avait besoin de coordination. Ils (les militaires, ndlr) avaient les armes, et nous nous avions seulement Whatsapp. », explique encore Tahirou.« L’enjeu n’était pas seulement la réussite des protestations, l’enjeu était carrément la survie de chacun de nous. », poursuit-il. En effet, face à la détermination des militaires à en découdre avec les manifestants, ceux-ci n’avaient d’autre choix que de s’organiser. Selon la plupart de ces jeunes, il n’y avait pas de responsabilité centrale, et les ordres étaient donnés sous forme de conseils. Ainsi, tel conseillait à la foule de s’orienter vers une artère où les barricades étaient affaiblies, et tel autre informait qu’une artère ou une autre disposait d’un point d’eau. Protéger les robinets et points d’eau pour pouvoir se débarbouiller en cas de malaise causé par les gaz lacrymogènes, s’orienter dans une ville devenue le nid de la répression, les objectifs des groupes ainsi formés étaient passés du simple outil d’information à la nécessité opérationnelle. D’où l’utilisation, par ailleurs, d’un « vocabulaire adapté », selon l’expression de Tahirou qui a tôt fait d’en préciser l’objectif : tromper la vigilance.

C’est par l’exemple qu’il illustre ce vocabulaire de crise. « Les forces de l’ordre nous ont mackysallé, j’ai dû achiller par la clôture pour aller léoncer un peu avant la reprise ! » Le procédé est peut-être intuitif, mais il garde l’empreinte du génie de ces jeunes gens aiguillonnés par les impératifs circonstance. En s’inspirant des noms de personnalités qui ont marqué cette période d’instabilité, ils ont forgé un vocabulaire nouveau et résolument contextuel. L’allusion est voilée, mais aussi railleuse et parfois stigmatisante, avec comme vecteurs, là encore, ces groupes Whatsapp transformés en conseils de crise. Ainsi, il faut traduire « Mackysaller » par « tromper », en référence à l’attitude du président sénégalais Macky Sall dans le cadre du premier accord intervenu sous l’égide de la CEDEAO (Communauté Économique des États d’Afrique de l’Ouest, ndlr) ; la prise en compte de l’amnistie pour les putschistes était perçue comme une fourberie à l’égard du peuple. Le verbe « achiller » signifiera « s’enfuir » parce que Achille Tapsoba, un ancien député du Congrès Démocratique pour le Progrès (CDP, parti de l’ancien président déchu, ndlr) avait pris la poudre d’escampette dès les premières heures de la révolte. Par ailleurs, « on dit « léoncer » pour signifier « faire une sieste pendant qu’il se passe quelque chose d’important. C’est une allusion au deuxième vice-président du CDP qui a été vu à la télévision en train de dormir en plein débat à l’assemblée nationale », explique encore Basidou Kinda. Ce qu’il relève ainsi, c’est qu’au-delà de son caractère anecdotique, l’utilisation de Whatsapp et des réseaux sociaux par la jeunesse, devient de plus en plus, un facteur important de l’activité politique.

Claude Biao,

(Source : Ecce Africa, 12 octobre 2015)

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