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Addiction aux jeux en ligne : L’épique pari sportif des jeunes

lundi 26 juillet 2021

L’ère des paris sportifs en ligne n’est pas une parenthèse éphémère. Il y a un fond sombre qui a changé la façon d’être de beaucoup de jeunes, désœuvrés ou pas, avides de gain ou pas. Ils y cherchent, tous, leur raison d’être mais certains y trouvent la dépendance au jeu.

À l’image des séances de « Simb » où les faux lions s’installent, avec fracas, l’après-midi, dans un quartier, et disparaissent sans « sabar » ni « bumb-bumg », aux limbes de la nuit, une carriole tractée par un cheval surgit sur la chaussée, avec grand bruit, puis s’éloigne au profit du silence. Non sans trace. Le crottin déposé par le canasson sur le goudron chauffé à blanc à midi finit par dégager des relents renfrognant l’olfactive. Pollué, l’air ambiant se dissémine dans un rayon d’une vingtaine de mètres. À peu près. Juste assez pour faire immixtion dans un local et gêner un petit attroupement et les papilles de Fatima. « Ça sent mauvais », a-t-elle juste le temps de dire, avant de se couvrir la bouche avec sa main. T-shirt vert sur lequel un slogan vante les mérites du pari sportif, taille moyenne, poitrine proéminente, visage avenant, la jeune femme fait partie des vendeuses de ce que les joueurs appellent le « MS (Mini shop) de Wakhinane », une des quatre communes de la ville de Guédiawaye.

Sous cette appellation d’initiés, il y a la typologie des salles de jeu composée de deux modèles principaux : les « MS », donc les Mini shop, sont des pièces qui font rarement plus de 15 m2 ; et les Game center qui sont des centres de jeux beaucoup plus grands et offrant plus de possibilités aux joueurs. Quelle qu’en soit la différence, ces lieux accueillent les mordus du pari sportif dont l’exploitation est composée de plusieurs strates. Fin décembre 1987, une loi autorise la création de la Loterie nationale sénégalaise (Lonase) et lui confère l’exploitation exclusive de toutes les formes de loteries, de jeux de hasard, de pronostics et assimilés au Sénégal. Ce qui fait que la salle de jeu n’est pas gérée directement par la Lonase. « Non ! Mon employeur, c’est ‘’Premier sénégalais’’, l’entreprise qui exploite la licence », précise la vendeuse, avant d’être coupée par un jeune homme à la mine défaite par un espoir envolé : « Vous, vous êtes dernier sénégalais ». Face à l’attaque frontale, la réponse ne tarde pas à arriver. « Personne ne t’a obligé à franchir la porte d’entrée. T’es majeur et vacciné ».

L’échange à fleurets mouchetés passe inaperçu aux yeux d’une demi-douzaine de jeunes hommes aux traits à peine sortis de l’adolescence. L’un d’eux a les yeux rivés sur les écrans. De loin, en suivant son regard, on aperçoit des animaux à quatre pattes en train de courir. De plus près, ce ne sont pas des canassons mais des clébards. D’encore plus près, ce ne sont plus de vrais chiens mais des canidés recomposés virtuellement. Le joueur post-pubère n’a cure de la réalité virtuelle. Sa concentration est au maximum. Les yeux écarquillés au fur et à mesure que la ligne d’arrivée se rapproche. Tout d’un coup, le soufflet tombe. Visage livide. Pari épique, mais pari perdu. Il se retourne, s’informe sur l’horaire de la prochaine course, regarde l’heure en s’impatientant comme un enfant qui compte les jours qui le sépare de la Tabaski. Assis à même le sol, Modou Awa est tout aussi désemparé. T-shirt bleu Grand and Hills dont le foncé n’a pas résisté au dépareillage naturel du soleil, il a l’air d’un garçonnet dont le visage poupon cache mal les coups de poings que lui assène la vie. « Je suis bien majeur. Je suis né en 1989 même si mes papiers font référence à une naissance en 1991. Je ne fais juste pas mon âge à cause de mon corps d’adolescent », précise-t-il, un peu vexé quand des doutes questionnent son droit de présence dans le Mini shop dédié au pari sportif.

Six mois d’abstinence

Sur la devanture de celui de Wakhinane-Nimzatt, il y a trois signes sémiologiques indiquant que le jeu est interdit aux moins de 18 ans. « Oh… il n’est pas rare d’y voir des plus jeunes y entrer », fait remarquer Madiama, voisin du centre de jeu et témoin de la scène. Modou Awa préfère évacuer ce sujet. « Moi, je joue depuis 2015 donc, j’étais majeur. Mais depuis, j’ai chopé le virus et je ne peux plus m’en départir. Je viens jouer presque tous les jours, excepté le mois de ramadan », raconte-t-il. Le jeune trentenaire admet son addiction au jeu. « Mais il m’est déjà arrivé de rester six mois sans y mettre les pieds. J’avais décidé de me guérir de cette drogue. Il a fallu, un jour de morale en baisse, que je passe devant le MS pour rechuter », explique-t-il. Modou Awa avoue avoir perdu aux jeux du pari sportif « certainement des millions ». « Il y a cinq jours, j’ai perdu 37.000 FCfa en une journée et la semaine d’avant j’avais perdu 55.000 FCfa. Je ne perds plus que je ne gagne. La plus grosse mise gagnée dans ce MS est de 177.000 FCfa, la veille d’un Magal. Tous ces jeunes qui sont là (index pointé vers eux) sont à peu près comme moi. On a fini par être amis car nous souffrons de la même chose. Quand ils gagnent, certains partagent une partie de leurs gains avec les autres habitués du lieu. Parfois, c’est 2.000 FCfa distribués à chaque habitué. Parfois plus, parfois moins ». À peine sa phrase terminée, un de ses « amis » de jeu l’accoste : « Combien de buts pour la France ? Dis-moi, s’il te plait. Je veux miser sur le nombre de buts que les Français vont marquer ». En ce mercredi 23 juin, l’affiche du jour qui fait le plus parler est France – Portugal, match du premier tour de l’Euro 2020. Modou Awa prend congé et retourne à ses affaires. Électricien bâtiment de formation, éleveur de moutons de race, de pigeons et d’autres animaux domestiques, il a « délaissé toutes (ses) activités professionnelles à cause de son addiction au jeu ». L’heure du match France – Portugal approche.

Le petit local du MS est en mode accordéon. Il se remplit et se vide, au gré des tickets validés auprès des vendeuses. Mais pour un petit groupe de jeunes, il n’est pas question de le quitter. Ils y sont ancrés à leur sort comme un bateau usé qui ne sort jamais du port. Même en plein soleil, ils prennent les traits de Blanche-Neige croquant, avec amertume, le fruit.

Moussa Diop

(Source : Le Soleil, 26 juillet 2021)

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